CRAAD-OI et Collectif TANY | 29 avril 2021 [EN]
MADAGASCAR : PIRE QUE LE PROJET DAEWOO, LA STRATEGIE NATIONALE DE L’AGRIBUSINESS
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RESUME
Cet article aborde trois sujets relatifs aux terres malagasy « réservées pour des projets d’investissement » :
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4 millions d’hectares d’aménagement pour des agropoles, un nouveau type de zones d’investissement à la mode en Afrique, sont prévus dans les 10 ans à venir selon la Stratégie Nationale de l’Agribusiness.
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Un projet de loi-cadre sur les terrains dit « à statuts spécifiques » sera probablement soumis par le gouvernement à l’Assemblée Nationale pour approbation à la prochaine session parlementaire.
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Les 60.000 hectares mis à la disposition du groupe émirati Elite Agro LLC par le Ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche dans le Bas-Mangoky.
Les agropoles ou pôles de croissance agricole « sont un ensemble d’entreprises, situées dans une zone géographique délimitée, qui entretiennent des relations fonctionnelles dans leurs activités de production, de transformation et de commercialisation d’un produit animal, végétal halieutique ou forestier ». C’est une autre forme des Zones Economiques Spéciales (ZES), une nouvelle tendance des dirigeants en Afrique qui a vu l’émergence de plus de 30 pôles de croissance couvrant plus de 3,5 millions d’hectares dans 23 pays depuis 15 ans, Les recherches en Afrique ont montré que l’efficacité de ces partenariats public-privé pour la lutte contre la pauvreté et pour la sécurité alimentaire n’a pas été prouvée. La surface prévue par les responsables malagasy est scandaleuse et inacceptable, plus du triple de la surface convoitée par le projet Daewoo en 2008. Mais indépendamment de la surface, au lieu de confier l’agriculture malagasy à des acteurs privés, hommes d’affaires nationaux, firmes multinationales, pas forcément agriculteurs, qui préfèrent souvent se consacrer aux cultures de rente et d’exportation, sous prétexte de modernisation et de transformations bénéficiant à une minorité dans le cadre de l’agribusiness, nous proposons de privilégier les paysans et les exploitations familiales qui font travailler principalement tous les membres de leurs familles pour assurer l’alimentation de l’ensemble des habitants et d’accorder davantage de réflexions, d’efforts, de moyens, et de fierté dans la réussite d’actions ayant des retombées positives pour la population rurale qui constitue la majorité des Malagasy.
Le mot « agropole » ne figurait pas dans le texte du projet de loi mais une présentation sur les agropoles a été faite pendant un atelier de finalisation du projet de loi-cadre sur les terres incluses dans les aires soumises à des régimes juridiques spécifiques à Antsirabe en mars 2020. L’esprit, les principes et les procédures décrits dans ce projet de loi ont provoqué des protestations de la part de diverses entités, notamment l’absence d’implication des communautés de base et des collectivités décentralisées dans les prises de décisions et la lourdeur des procédures et des coûts rendant impossibles la réalisation des projets de développement local sur les terrains dits « à statuts spécifiques ». « L’impact du contenu de cette future loi-cadre sur le développement du pays dans des secteurs stratégiques » et « les conséquences importantes inévitables qu’aura la version finale de ce projet de loi sur l’ensemble de la population malagasy » ont amené 40 organisations de la société civile à écrire au gouvernement en mai 2020 pour exprimer leur souhait d’élargir la consultation aux communautés locales et acteurs concernés directement par les différents types de terrains dans les différentes régions. Le refus de concertations régionales et de diffusion de la version actuelle de la loi-cadre sur les terrains à statuts spécifiques font craindre que des changements significatifs n’aient pas été apportés à la suite des consultations par mail effectuées par le Fonds National Foncier. Des concertations interrégionales seraient prévues pour un projet de loi sur les domaines fonciers communautaires. La plus grande vigilance est ainsi recommandée à tous les citoyens, mais surtout aux députés et sénateurs qui engageront leur responsabilité au cours de l’examen et du vote du projet de loi-cadre sur les terrains à statuts spécifiques, qui déclenchera une série d’autres lois et de mesures cruciales.
Le 7 avril 2021, le Conseil des Ministres a approuvé la mise en place d’une task force (groupe de travail) interministérielle pour organiser et coordonner la mise en place des 60.000 ha mis à la disposition du groupe émirati Elite Agro LLC par l’Etat malagasy dans la région Menabe. Différentes demandes d’éclaircissement sur ce projet sont adressées aux hautes autorités nationales, en particulier : ce projet bénéficiera-t-il des infrastructures hydroagricoles financées par des prêts auprès de la Banque Africaine de Développement que des générations de Malagasy devront rembourser ? Tout en confirmant le refus du projet, nous proposons que les paysans malagasy soient privilégiés dans l’attribution de terrains dans le Bas-Mangoky, aussi bien sur la rive droite que sur la rive gauche, notamment les migrants venant du Sud, qui fuient la sécheresse, devraient être installés sur ces terres, avec différentes mesures d’accompagnement consistantes qui seront déterminées avec leur participation aux échanges et décisions.
Introduction
Les organisations signataires de cet article communiquent régulièrement sur les orientations de la politique publique des dirigeants malagasy actuels dans le domaine du Foncier et de l’Agriculture. Ce travail de veille se poursuit à travers cette publication qui révèle à la fois une stratégie implacable, un projet de loi contesté, et un cas concret à l’œuvre.
Une stratégie nationale de l’Agribusiness, qui a déjà fait l’objet d’une réunion de validation de sa mise en œuvre en juillet 2020, ambitionne d’aménager 4 millions d’hectares d’agropoles à cette fin. Nous verrons en quoi consiste le concept d’agropole dont des exemples existant en Afrique ont donné lieu à des recherches éclairantes.
En outre, un projet de loi sur les terrains à statuts spécifiques risque d’être soumis au Parlement à la session prochaine du mois de mai. La version 2020 de ce projet a été débattue entre les autorités compétentes et les organisations de la société civile malagasy. Si les principaux éléments de la discussion sont présentés ici, il y a fort à craindre que la non diffusion de la version finale du projetde loi signifie que des points contestés n’aient pas été modifiés. Cet article se focalisera sur les terrains destinés aux zones d’investissement.
Enfin le projet controversé de prêt de 60.000 hectares de terre au groupe émirati Elite Agro LLC suscite de nombreuses questions et réflexions. Des propositions plus favorables à la majorité de la population malagasy sont indispensables.
L’objectif de cette publication est d’alerter les élus, de partager avec les citoyens la connaissance que nous avons de cette stratégie, avec ses projets de loi et transactions foncières plus ou moins cachés au grand public. Nous espérons que des débats soient encore possibles et puissent changer les orientations et les priorités mentionnées par les décideurs dans ces documents et projets dont nous contestons fortement le contenu.
I - Quatre millions d’hectares d’agropoles pour l’agribusiness annoncés dans la Stratégie Nationale de l’Agribusiness.
En septembre 2019, la presse nationale s’est faite l’écho discret de l’élaboration d’une stratégie nationale de l’agribusiness à Madagascar (1). Pourtant, le 15 juillet 2020, un atelier a validé sa mise en œuvre, comme nous l’avions évoqué dans un article du 22 février 2021 intitulé « L’Agrégation Agricole dans la Stratégie Nationale de l’Agribusiness à Madagascar » (2)
Nous avons espéré en vain que les responsables gouvernementaux informent le public au cours des semaines suivantes. Il est de notre devoir de divulguer une donnée gravissime de la Stratégie Nationale de l’Agribusiness de juillet 2020 selon laquelle « 4 millions d’hectares d’agropoles aménagés, viables et avec organisation de gestion claire » sont programmés dans les 10 années à venir (3). Cette superficie gigantesque équivaut à trois fois la surface impliquée dans le projet Daewoo Logistics de 2008. Elle dépasse la totalité des surfaces cultivées par les paysans malgaches sur l’ensemble de l’île, ce qui est absolument inacceptable lorsque l’on sait que les investisseurs seront davantage intéressés par les cultures de rente ou autresà exporter que par les denrées alimentaires destinées à la population malagasy.
« Les agropoles ou pôles de croissance agricoles sont définis comme un ensemble d’entreprises, circonscrites dans une aire géographique donnée, qui entretiennent des relations fonctionnelles dans leurs activités de production, de transformation et de commercialisation d’un produit animal, végétal, halieutique ou forestier donné » dont plusieurs dizaines existent déjà en Afrique. La Banque Africaine de Développement fait partie des institutions internationales qui font la promotion de ce modèle. Leurs objectifs seraient
- d’accorder l’exploitation et le développement des zones géographiques favorables à la production d’un produit de l’agriculture, de l’élevage ou de la pêche à des entreprises qui assureraient la production, la transformation et la commercialisation de cette denrée, en dirigeant et en coordonnant tous les acteurs et services relatifs au développement de cette « chaîne de valeurs »
- afin de produire de la richesse, de l’emploi et de répondre aux besoins des marchés » (4)
L’un des modes de fonctionnement souvent prôné et utilisé est l’agrégation agricole, déjà décrite et analysée dans notre précédente publication.(2)
« Selon l’IISD - International Institute for SustainableDevelopment -, qui conseille les gouvernements et les parlementaires sur la façon d’attirer des investissements agricoles responsables pour atteindre le développement durable (,) « l'Afrique a vu l'émergence de 36 pôles de croissance agricole […]au cours des 15 dernières années. Ils couvrent au moins 3,5 millions d'hectares de terres dans 23 pays […]. Les agropoles - également appelés pôles de croissance agricole - représentent une nouvelle tendance dans la stratégie de développement agricole de l'Afrique. » [..]En 2014, les chefs d’État africains se sont engagés à éradiquer la faim et la pauvreté rurale par une transformation de l’agriculture africaine, y compris un appel à la transition d’une agriculture de subsistance vers une agriculture commerciale. Un certain nombre de gouvernements africains considèrent ces pôles et les couloirs de croissance comme un moyen d’attirer des investissements privés pour promouvoir la transformation agricole.Les agropoles font ainsi partie de la gamme d’outils de promotion du développement de l’investissement agro-industriel, comme les Zones Economiques Spéciales (ZES), que les dirigeants africains expérimentent pour libérer le potentiel agricole de l’Afrique. Ils « sont également envisagés comme un moyen de contrer les impacts négatifs et la (mauvaise) publicité qui ont résulté de la location de vastes étendues de terres agricoles aux investisseurs, communément appelés « accaparement des terres »»(5).Mais l’efficacité de ces partenariats public-privé pour la lutte contre la pauvreté et pour la sécurité alimentaire n’a pas été prouvée à ce jour. (6)
Cette approche se base sur l’urgence de produire plus, d’investir plus et de « moderniser » plutôt que de produire mieux, de produire autrement, et de mieux répartir et protéger l’alimentation. Selon ses promoteurs, il est essentiel de faciliter l’entrée massive dans le secteur agricole de grands acteurs privés non agriculteurs : entrepreneurs, hommes d’affaires nationaux, firmes multinationales ou investisseurs étrangers. Avec la conviction sous-jacente que les productrices et producteurs à petite échelle ne peuvent pas relever le défi de nourrir les pays africains, alors qu’ils fournissent déjà la grande majorité de l’alimentation disponible sur le continent (6)et sont nettement plus productifs (8).
La conclusion d’une étude réalisée par plusieursONGs met en évidence divers problèmes rencontrés par les agropoles, dont nous ne citerons que ce paragraphe : « Les premiers bénéficiaires des pôles de croissance agricoles sont les entreprises de production, transformation et de commercialisation qui sont visées par les différentes mesures d’incitation que concentrent les pôles. Les productrices et producteurs à petite échelle sont quant à eux destinés à être soit déplacés pour libérer des terres pour les investisseurs, soit formés pour devenir employés sur les plantations, méga-fermes ou dans les usines des firmes, soit contractés pour fournir des matières agricoles aux entreprises agroalimentaires à partir de la part –généralement minime – de terres aménagées qui revient aux agriculteurs familiaux. Les pôles de croissance agricoles cumulent donc les mêmes risques d’exposition des ouvrier.e.s et productrices ou producteurs aux diktats d’entreprises agroalimentaires contrôlant les chaînes d’approvisionnement internationales et de concurrence déloyale à l’encontre des agricultures familiales sur l’accès aux terres, aux financements et aux incitations ou subventions que les projets d’irrigation à grande échelle, de contractualisation et de développement de chaînes de valeur, d’acquisition de terres à grande échelle et de plantations, particulièrement pour les femmes. » (6)
Les multiples difficultés rencontrées par les nombreux cas étudiés par divers chercheurs dans des agropoles qui ont démarré depuis longtemps tels que
- ceux de Yaanovel en Côte d’Ivoire (7), dont l’expérience « pose la question de la concentration du secteur et de la durabilité des PPP» (partenariat public-privé)
- et de Bagrépole au Burkina Faso (7)(9), où « les espoirs sur l’apport des agrobusinessmen restent frustrés par des retards et blocages ».
renforcent la conviction que les bénéfices ne compensent pas les pertes, ni pour l’Etat ni pour la population, dans les expériences connues, et qu’il est urgent de ne pas prendre de risques aussi coûteux.
Ni la Stratégie Nationale de l’Agribusiness et ses 4 millions d’hectares, ni le Plan Emergence de Madagascar (version Janvier 2021), où figurent des données accablantes concernant la priorité accordée aux investisseurs sur les terres malagasy, n’ont été publiés de manière officielle. Nous espérons que le report de la diffusion publique de ces documents de politique générale de l’Etat traduise le développement de controverses et de discussions dans les coulisses des hautes sphères sur l’attribution excessive et dangereuse de terrains aux investisseurs. En effet, nous espérons que parmi les responsables à différents niveaux des institutions et structures de l’Etat existent des personnes plus conscientes et soucieuses que les autres de la nécessité de préserver les terres malgaches, de prioriser les paysans et les exploitations familiales dans les politiques foncières et agricole et d’accorder davantage de moyens, d’efforts et de raisons de fierté dans la réussite des actions ayant des retombées positives pour la majorité de la population. C’est tout le contraire des actions prétendument modernes et brillantes qui profitent à un petit nombre mais cachent la misère et la dégradation des conditions de vie de la majorité de la population et provoquent l’extension de la famine.
Ces agropoles ne sont pas du tout mentionnées dans le projet de loi-cadre sur les terrains à statuts spécifiques, elles ont pourtant fait l’objet d’une présentation pendant un atelier de finalisation de ce projet de loi-cadre à Antsirabe en mars 2020.
La tendance des dirigeants malagasy à faciliter l’acquisition de zones dédiées aux investissements par des investisseurs nationaux ou étrangers a fait partie des sujets de controverses entre le gouvernement et les organisations de la société civile, entre les mois de mars et mai 2020, lors des échanges sur le projet de loi sur les terrains à statuts spécifiques qui pourrait être soumis par le gouvernement à la prochaine session parlementaire de mai 2021.
II - Le projet de loi-cadre sur les terrains à statuts spécifiques
Les terres incluses dans les aires soumises à des régimes juridiques spécifiques, que l’on désigne, par facilité, par terrains à statuts spécifiquesconstituent la cinquième catégorie de statut de terrains définis par la réforme foncière de 2005 - après les domaines de l’Etat publics et privés et les propriétés privées titrées et non titrées – et sont composés de plusieurs types de terrains,
« - des terrains constitutifs de zones réservées pour les projets d’investissement,(mais aussi)
- des terrains qui relèvent du domaine d’application de la législation relative aux Aires protégées ;
- des terrains qui servent de support à la mise en application de conventions signées dans le cadre de la législation sur la gestion des ressources naturelles ;
- des terrains qui sont juridiquement définis comme relevant de l’application du droit forestier ;
- des terrains qui sont constitués en espaces protégés en application d’une Convention internationale ratifiée par la République de Madagascar » (loi 2005-019 art.38)
A la sortie de cet atelier auquel avaient participé plusieurs représentants des structures de l’Etat et des représentants des organisations de la société civile (10), une version (mars 2020) du projet de loi sur les terrains à statuts spécifiques a été diffusée par le Fonds National Foncier le 23 mars 2020 pour recueillir les dernières observations des destinataires.
D’autres types de terrains ont été ajoutés dans cette version du projet de loi par rapport à la liste figurant dans la loi de 2005 :
- « des domaines communautaires ;
- des terrains à gestion communautaire ;
- des réserves foncières. »
Les commentaires et échanges avec le gouvernement sur le projet de loi-cadre en 2020
Le 27 mars, le Collectif TANY, qui a fait partie des destinataires du projet de loi, a répondu au Fonds National Foncier pour exprimer son « désaccord profond avec l’ensemble du projet de loi » car selon le texte proposé
- Seuls le Ministère sectoriel et le Ministère en charge du Foncier décident de la vocation des terrains à statuts spécifiques. Ni les propriétaires de terrain, ni les Collectivités décentralisées, ni les élus et acteurs ni les communautés locales n’étaient prévus d’être impliqués dans le choix de la vocation, de la création et de la gestion des terrains à statuts spécifiques lorsque la proposition ne venait pas d’eux ?
- Les propriétés privées titrées et les propriétés privées non titrées (transformées et) incluses dans les aires spécifiques seraient bornées au nom de l’Etat et ne seront plus récupérables par leurs propriétaires et par leurs occupants. Ces derniers ne seraient plus propriétaires mais seraient au mieux gestionnaires soumis à un cahier des charges rédigé sans leur contribution et n’auraient plus le droit de transmettre à leurs enfants ou de vendre ?
- Les petites forêts gérées actuellement par des VOI (communautés de base) semblaient disparaître et être gérées désormais dans le cadre de cette loi.
- Ni les zones de développement local et les pâturages collectifs, ni les terrains destinés à l’accueil de jeunes paysans, ne pourraient assumer financièrement et temporellement la procédure ministérielle envisagée ?
- Au final, les aires soumises à des régimes juridiques incluses dans ce projet de loi, notamment les zones d’émergence, destinées aux investissements, vont bénéficier d’une « protection spécifique » au détriment de l’usage coutumier et de la possession familiale ou lignagère.
- La « redistribution des terres » évoquée dans l’avant-dernier paragraphe de l’Exposé des motifs sera donc faite finalement en faveur des opérateurs capables de financer les procédures (et donc probablement aux seuls investisseurs de grande envergure) au détriment des propriétaires, occupants et usagers actuels.
Etant donné que ces investisseurs de grande envergure que les dirigeants et décideurs recherchent en déployant de grands moyens sont les investisseurs étrangers, des questions cruciales se posent
- concernant le libre accès des citoyens malgaches sur chacune des zones spécifiques définies par ce projet de loi,
- sur la capacité d’exercice des services de l’Etat tels que ceux des impôts et des douanes, d’institutions de contrôle comme le BIANCO, la police nationale, la gendarmerie nationale, l’inspection du travail, etc… qui démontrera l’exercice de la souveraineté nationale sur tous ces terrains (critique déjà formulée vis-à-vis de la loi sur les Zones Economiques Spéciales),
- sur l’adoption des principes de transparence et de redevabilité dans les textes comme dans la pratique concernant tous ces terrains qui bénéficieraient de « protections spécifiques »
Le Collectif TANY avait donc demandé la diffusion de ce projet de loi au grand public afin de permettre une information claire et accessible à tous les citoyens et un débat incluant tous les acteurs concernés (maires, communautés de base, secteur privé, acteurs locaux et juristes œuvrant dans les secteurs de l’environnement, des forêts, etc..) de toutes les régions, avant la présentation de ce projet de loi devant l’Assemblée Nationale. Puis un groupe de 6 organisations de la société civile (OSCs) a envoyé une lettre au gouvernement, appuyant la demande de concertation et de débats avant la transmission du projet de loi sur les terrains à statuts spécifiques à l’Assemblée.
Monsieur Le Ministre de l’Aménagement du Territoire a répondu le 6 avril que « […] le processus pour l’élaboration de ce projet de loi a commencé depuis 2005, […] la Plateforme de la Société civile est représentée auprès du CRTF (Comité de Révision des textes sur le Foncier) depuis 2011, de nombreux représentants de la société civile ont participé à l’atelier consacré à l’élaboration dudit projet de loi. […] Comme la période de confinement ne vous a pas empêché de se concerter pour formuler une demande commune de report de la prise de décision sur le Projet de loi en objet, l’Administration estime que cette période est à valoriser pour approfondir les réflexions sur ce texte et exprimer vos observations et commentaires. Après la soumission de ce projet de loi auprès de la Commission sur la réforme des droits des affaires, un atelier de restitution final sera programmé. A titre d’information, un programme d’acquisition d’orthoimage de couverture nationale est préparé actuellement par le MATP en collaboration avec les partenaires techniques et financiers afin de résoudre les problèmes liés à la délimitation des statuts des terres à Madagascar dont les terrains à statut spécifique et réduire le coût pour la sécurisation foncière. » (11)
Le 22 mai 2020, 40 OSCs ont signé un communiqué demandant l’organisation de concertations régionales (12) (13). En conséquence, le projet de loi n’avait pas été soumis à la session parlementaire de mai 2020. Le Fonds National Foncier a continué des consultations par email auprès d’acteurs de différents secteurs (agriculture, industrie, commerce, mines, environnement, société civile, tourisme) à la place des concertations demandées.
L’évolution de la situation en 2021
Le projet de loi, -sûrement dans une nouvelle version-, a été validé par le Comité de Révision du Droit des Affaires. Par ailleurs, un atelier de capitalisation sur les domaines fonciers communautaires, qui ont donc été exclus des terrains à statut spécifique et vont faire l’objet d’un autre projet de loi, a eu lieu à Antsirabe en mars 2021. Le projet de loi sur les terrains à statuts spécifiques va probablement être soumis au Parlement au cours de la session de mai 2021.
Le Collectif TANY a adressé une lettre à Monsieur Le Ministre de l’Aménagement du Territoire le 6 avril 2021, mettant en évidence les points ci-dessus et lui demandant de bien vouloir partager la version actuelle du projet de loi sur les terrains à statuts spécifiques avec les organisations de la société civile signataires du communiqué du 22 mai 2020.(14)
Ce courriel n’ayant pas obtenu de réponse, nous tenons à partager avec tous les citoyens malagasy, et notamment avec les parlementaires qui seront amenés à s’exprimer sur ce projet de loi, les raisons de nos inquiétudes à partir de la version de mars 2020 (15), carle refus des autorités exécutives de faire preuve de transparence sur la version « 2021 » de ce projet de loi sur les terrains à statuts spécifiques nous rend pessimistes par rapport à une modification éventuelle de l’esprit de la loi dans le sens des intérêts de la majorité des Malagasy de toutes les régions, aux moyens financiers limités.
La vigilance des députés et sénateurs est donc particulièrement sollicitée face aux diverses approbations de lois et ratifications d’accords qui leur seront requises au cours de la session à venir
- car la future loi-cadre sur les terrains à statuts spécifiques engendrera de nombreuses nouvelles réglementations et conséquences dans plusieurs secteurs stratégiques,
- plus que jamais, la décision des parlementaires aura un impact énorme sur l’accès à la terre et la possibilité de développement de la population rurale malagasy, qui constitue les trois-quarts de habitants, et notamment les paysans qui produisent actuellement la majorité des denrées alimentaires consommées à Madagascar.
- Une forte expansion des terrains à statut spécifique selon les principes contestés en 2020 pourrait même détruire le sens de “terres communautaires”.
- C’est finalement l’avenir de l’ensemble de la nation malagasy et des générations futures sur leurs terres qui est en jeu.
Ces considérations relatives à la Stratégie Nationale de l’Agribusiness et aux dangers du projet de loi ne font pas partie d’une fiction ni de possibilités pouvant survenir dans le long terme. Un cas concret d’attribution d’une très vaste superficie de terres à des investisseurs étrangers s’est déjà imposé dans la réalité malagasy.
III - Le projet du groupe émirati Elite Agro LLC revient sur les tablettes
En février 2020, le Ministre de l’Agriculture malgache avait publié un communiqué annonçant la signature d’un Memorandum of Understanding (MoU) concernant la « mise à disposition »pour le groupe émirati Elite Agro LLC, sous forme de prêt, de 60.000 ha de terres dans le Bas-Mangoky au sud-ouest deMadagascar(16). Dans le cadre d’un premier communiqué exprimant le refus de ce projet, nous avions mis en évidence diverses contradictions dans les déclarations des hauts dirigeants, notamment concernant l’existence ou non d’habitants et de communautés qui vivent dans la zone concernée (16). Malgré les sollicitations, le gouvernement n’a pas divulgué à tous les citoyens le contenu du MoU signé en 2020.
Après plus d’un an de silence des décideurs sur ce projet contesté par plusieurs citoyens à Madagascar, le Conseil des ministres du 7 avril 2021 a mis en place une « task force » (groupe de travail) impliquant plusieurs ministères pour coordonner et organiser la réalisation de ce projet du groupe Elite Agro (17).
Le principal changement noté dans le compte-rendu du Conseil des Ministres concerne la destination des récoltes : « 70% des denrées alimentaires que la société produira seront vendues à un prix modique sur le marché local et 30% seront offerts gratuitement à l’Etat malgache » (17), alors que l’année précédente, on nous avait dit que « toute la production serait achetée par l’Etat malagasy à un prix modique, conformément à l’accord entre les deux parties, pour approvisionner le marché local afin d’atteindre l’autosuffisance alimentaire et l’exportation »(18).
Ces changements pourraient être dus à une modification des clauses du MoU ou du contrat avec le groupe Elite Agro, dans tous les cas, le dernier document signé doit être diffusé au grand public.
Cette mise en place de task force suscite de nombreuses interrogations :
- Est-ce une mascarade de reprise en mainpar le gouvernement, face aux critiques de perte de souveraineté ?
- Ou est-ce une tentative de diluer entre plusieurs ministères la responsabilité de cette nouvelle affaire « à la Daewoo », qui se présente sous la forme d’une vente gratuite, d’un bradage à grande échelle de la patrie ?
- La présence du Ministère de l’Industrie et du Commerce dans la task force signifierait-elle que de nouvelles clauses du MoU ne limitent pas les activités du groupe à la production agricole mais les étendent à une transformation de certaines denrées ?
- La collaboration du Ministère des Transports, du Tourisme et de la Météorologie est-elle motivée par des projets de construction de terrain d’aviation et/ou d’un port à l’intérieur de la zone « prêtée » ?
- La localisation du projet Elite Agro LLC sur la rive droite du fleuve Mangoky connue dès janvier 2020 est confirmée par le compte-rendu du Conseil de gouvernement du 7 avril 2021 (19). L’inexistence d’informations publiques sur un début d’aménagement de la rive droite au cours de l’année, combinée à l’implication du Ministère de l’Eau dans la task force provoque une interrogation majeure : serait-il possible que la société émiratie ne construise pas de nouvelles infrastructures propres au projet sur la vaste superficie mise à sa disposition par l’Etat malgache mais compte profiter des infrastructures hydroagricoles de la rive gauche financée par plusieurs prêts du Fonds Africain de développement et de l’OPEP via la Banque Africaine de Développement de quelques dizaines de millions de dollars (20) que des générations de Malagasy vont rembourser ? Ce serait absolument scandaleux.
Des cultures intensives dans le cadre de l’agribusiness auront des conséquences dramatiques sur l’ensemble de l’écosystème de la région. Elles réduiront gravement les ressources en eau des populations et exploitations voisines et impacteront les nappes phréatiques, comme cela a déjà été observé au Maroc.(21)
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La phrase du communiqué ministériel du 15 janvier 2020 selon laquelle “le groupe prendra en charge tous les équipements et logistiques nécessaires” est-elle toujours d’actualité ?
La société Elite Agro n’est ni un organisme humanitaire ni une petite société, qui a besoin d’un “prêt de terre”, mais un puissant groupe agro-alimentaire qui cherche des terres à cultiver dans le monde entier, en Afrique (22), en Asie (23), en Europe (24) en vue de faire du profit et quelquefois en vue d’exporter des denrées alimentaires vers les pays du Moyen-Orient. Nous avions déjà rapporté que l‘opinion publique serbe se posait des questions sur la manière dont ce groupe et d’autres acteurs émirati ont agi pour devenir les plus grands propriétaires terriens en Serbie (25). Quand son objectif est de transférer des compétences aux habitants du pays qui lui accorde des terrains à cultiver, Il arrive que ce groupe signe un protocole d’accord clair et explicite sur le sujet dans l’objectif de transférer des compétences aux habitants du pays qui lui accorde des terrains à cultiver, comme en Algérie (26). Au cas où la partie malagasy ne disposerait pas d’un tel protocole d’accord, elle ne devrait ni s’attendre à un transfert de compétences de la part du groupe émirati, ni évoquer le sujet dans le vain espoir de faire avaler la pilule amère à la population malagasy.
Au lieu de prêter de vastes surfaces de terres à un puissant groupe émirati, le gouvernement devrait augmenter la surface des terres cultivées par les Malagasy.
- Les informations récentes mettent effectivement en évidence que la distribution de terres prévue sur la rive gauche de la rivière Mangoky est bloquée à cause des demandes trop nombreuses : alors que 3.000 à 5.000 dossiers répondant à certains critères en vue de recevoir 2,5 hectares étaient attendus (27), 15.000 demandes auraient été reçues, aussi la surface allouée à chaque ménage se réduirait à 1 hectare (28).
- Par ailleurs, les milliers de migrants climatiques qui ont dû quitter leurs terres ancestrales du Sud à cause de la sécheresse au cours des années 2019 et 2020 (29) pour chercher à vivre dans d’autres régions mieux dotées en eau, devraient, entre autres, bénéficier de ces terres. L’organisation d’une formation et d’un accompagnement solides pendant une période assez longue sera évidemment nécessaire pour leur permettre de s’initier à de nouvelles méthodes de travail et de s’adapter aux conditions de vie différentes.
- La recherche de différents moyens d’attribuer des terrains aux paysans qui ne disposent plus de surfaces suffisantes pour permettre de produire les denrées nécessaires à la subsistance familiale et à leur développement ainsi qu’aux nombreux paysans malagasy sans-terre (30), devrait faire l’objet de travaux sérieux impliquant de multiples acteurs et surtout les communautés locales des différentes régions. Ce projet de développement durable destiné aux populations rurales malagasy, qui constitue la majorité des habitants de Madagascar, mériterait largement la mise en place d’une task force interministérielle destinée à la coordination de l’installation de nouveaux paysans malagasy sur les rives gauche et droite du Bas-Mangoky.
Mais la volonté et le choix politiques des dirigeants les ont amenés pour l’instant à commencer à attribuer des miettes de terrains aux Malagasy à travers des titres verts (31) dans le cadre d’un projet-pilote dans le Vakinankaratra, dont bénéficieraient 22.000 ménages d’ici 2023 dans le meilleur des cas, tandis que des superficies gigantesques sont mises à la disposition de groupes étrangers pour développer l’agribusiness.
Conclusion
Le cas particulier du projet Elite Agro LLC a été présenté dans ce document en même temps que le projet de loi-cadre sur les terrains à statut spécifique et le programme gigantesque de 4 millions d’hectares d’agropoles à cause de la proximité dans le temps de l’annonce de la mise en place de la task forcé pour ce projet dans le Bas-Mangoky et l’imminence de la première session parlementaire. Les informations disponibles pour le grand public ne permettent pas de confirmer si la mise en œuvre et les procédures suivies dans le cadre du projet Elite Agro se conformeront aux préconisations de la loi-cadre sur les terrains à statut spécifique et répondront aux critères des agropoles.
Au-delà du manque de transparence, leur point commun réside dans la priorité accordée aux investisseurs par rapport aux paysans et à la majorité des citoyens malagasy. Ces choix et décisions sont partagés par les dirigeants successifs qui n’ont pas prouvé leur efficacité et que finiront par rejeter, tôt ou tard, les communautés de base et les citoyens au vu des réalités et des conséquences.
Un développement durable qui donne du travail, des sources de revenus, des terres où pratiquer des activités génératrices de revenus décents pour la majorité des familles et tous leurs membres dans les 22 régions de Madagascar devrait faire l’objet de réflexions et de concertations véritablement participatives, inclusives et démocratiques, dans la période actuelle particulièrement difficile.
29 avril 2021
Centre de Recherches et d’Appui pour les Alternatives de Développement - Océan Indien (CRAAD-OI)
[email protected] ; http://craadoi-mada.com
Collectif pour la défense des terres malgaches – TANY
[email protected] ; http://terresmalgaches.info; www.facebook.com/TANYterresmalgaches
Références :
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La stratégie nationale de l’Agribusiness dans la presse malgache : (https://lexpress.mg/03/10/2019/une-strategie-pour-lagribusiness/, et https://www.newsmada.com/2020/11/03/agribusiness-concertation-pour-une-strategie-nationale/).
-
http://www.terresmalgaches.info/newsletter/article/newsletter-no152,
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Extraits de la présentation de la SNAB du 15 juillet 2020 : http://terresmalgaches.info/IMG/pdf/snab.pdf
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Plusieurs sources
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IISD et Coulibaly,« L’investissement dans l’agriculture – Note de synthèse # 6, L’émergence des pôles de croissance en Afrique : https://www.iisd.org/projects/enfr-responsible-agricultural-growth-poles-and-corridors-africa-developing-legal-and)&https://www.iisd.org/articles/investissement-agricole-afrique
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https://ccfd-terresolidaire.org/IMG/pdf/rapport_pcaa_exe_ok.pdf).
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Tyrou, E. (2018) Les politiques publiques en Afrique de l’Ouest : le cas des agropoles. Mémoire de Master recherche en Études du Développement. Université Paris 1 : Institut des Études du Développement Économique et Social.
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Smallerfarmsharbour more biodiversity and have higheryields: https://rdcu.be/chtQv
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Réponse de Monsieur Le Ministre de l'Aménagement du Territoire du 6 avril 2020 http://terresmalgaches.info/IMG/pdf/reponse_du_ministre_matp_du_6_avril_2020.pdf
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A notre connaissance, d’autres entités, ont aussi transmis des lettres de protestation au gouvernement, pour différentes raisons.
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http://terresmalgaches.info/IMG/pdf/lettre_du_collectif_tany_au_mattp-2.pdf
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Non à la mise à disposition des 60.000 hectares à la société émiratie Elite Agro LLC à Madagascar : http://www.terresmalgaches.info/newsletter/article/newsletter-no-135
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https://www.farmlandgrab.org/post/view/30240-madagascar-projet-elite-agro-llc-dans-le-bas-mangoky
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Renforcement du refus du projet Elite Agro LLC dans le Bas-Mangoky http://www.terresmalgaches.info/newsletter/article/newsletter-no-136
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https://www.primature.gov.mg/index.php/2021/04/07/conseil-du-gouvernement-du-mercredi-07-avril-2021/
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https://www.agencemalagasydepresse.com/economie/agriculture-bas-mangoky-grenier-a-riz-de-madagascar/
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Association ATTAC/CADTM Maroc, Pour la souveraineté alimentaire au Maroc, pages 46-48 https://drive.google.com/file/d/1MfFGNFKj3QBGXKmsVD4hmfK4_XyVsrUr/view
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http://65.39.154.62/post/view/30020-sierra-leone-parliament-approves-agriculture-agreement-with-abu-dhabi&https://www.agenceecofin.com/investissement/1207-39492-maroc-elite-agro-veut-s-imposer-en-leader-du-secteur-fruitier, &http://65.39.154.62/post/view/29424-elite-agro-llc-renforce-sa-presence-au-maroc
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https://www.farmlandgrab.org/29419&https://www.farmlandgrab.org/post/view/29885-uae-agricultural-giant-invests-in-100-000-hectares-minister-of-environment-and-forestry-will-prepare-the-land
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https://www.farmlandgrab.org/post/view/29431-vucic-and-orban-s-agrarian-policy
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http://65.39.154.62/post/view/28887-uae-companies-one-of-the-biggest-landowners-in-serbia
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https://lexpress.mg/05/12/2020/bas-mangoky-quinze-mille-demandes-de-parcelles-de-terrain/
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https://www.rfi.fr/fr/afrique/20190407-madagascar-migrants-envahissent-parc-national-ankarafantsika et https://lexpress.mg/13/01/2021/migration-climatique-les-gens-du-sud-fuient-le-kere/
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https://www.lakroa.mg/item-2661_articles_economie_18-tantsaha-nefa-tsy-manana-tany-hambolena.html
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https://www.newsmada.com/2021/01/12/projet-titre-vert-22-000-beneficiaires-jusquen-2023/