Côte d’ivoire : La RSPO et le gouvernement refusent encore les plaintes des chefs de villages contre une plantation de caoutchouc

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Image : FinancialAfrik

Mongabay | 22 décembre 2022

Côte d’ivoire : La RSPO et le gouvernement refusent encore les plaintes des chefs de villages contre une plantation de caoutchouc

by Mireille Niyonsaba

  • Les villageois au sud-ouest de Côte d'ivoire veulent l'annulation de la certification d'une plantation.
  • Les chefs de villages disent que les populations riveraines ont perdu la terre et souffrent des inondations et de la pollution de l'eau liées à la plantation.
  • La Ministère de l’agriculture et du développement rural insiste que la plantation fût installée conformément aux règlements nationaux.
  • Un des principes de la certification par la Roundtable on Sustainable Palm Oil est que le droit d'exploiter la terre ne doit pas être légitimement contesté par les populations locales, mais la RSPO dit qu'elle n'a reçu aucune plainte ou rapport de grief concernant les opérations de la SOGB.

Les villageois au sud-ouest de Côte d’ivoire veulent l’annulation de la certification d’une plantation de l’huile de palme et caoutchouc. Ils disent que la société a accaparé leurs terres et ils sont menacés par les inondations et la pollution liées à la plantation.

En août 2021, les chefs de villages de l’Association des Villages Déplacés (AVD) au sud-ouest du Côte d’ivoire ont dénoncé les abus des principes de la Roundtable on Sustainable Palm Oil (RSPO) et le non-respect des engagements de la Société des Caoutchoucs de Grand-Béréby (SOGB), propriété du géant transnational de l’agroalimentaire Socfin.

Les chefs de villages demandent l’annulation de la certification d’une plantation qu’ils disent être en conflit de superficie exacte. Ils reprochent à la SOGB le non-respect des recommandations émises en octobre 2019 par le sous-préfet de Grand-Béréby, relatives à l’opposition au rafraîchissement des limites avec ces villages.

La SOGB bénéficie la certification RSPO depuis le 26 janvier 2021 en dépit de ces allégations.

L’AVD reconnaît les avancées opérées en matière de transparence lors des sessions d’audits de SCS Global, toutefois déplorant les problèmes socio-environnementaux qui persistent sur le terrain. L’association exige la reprise du processus.

Quelle défense contre les règlements coloniaux ?

Ce complexe occupe actuellement des terres de 34 712 ha, lesquelles à l’origine étaient occupées par des autochtones Kroumen au sud-ouest du pays dans la sous-préfecture de Grand-Béréby. Mais le procès-verbal d’une réunion d’information des chefs de villages concernés par ce projet le 12 juillet 1974 révèle que l’Etat de la Côte d’Ivoire a concédé un domaine de seulement 30 830 ha à la SOCATCI (l’actuelle SOGB).

Djou Gbouyou Saint Claire, secrétaire général de l’AVD, estime que la SOGB devrait d’abord restituer cette partie des terres évaluée à 4 000 ha occupées illicitement, avant d’entamer la phase du processus de certification RSPO. « Nos droits coutumiers ont été violés, nous sommes devenus des paysans sans terre, » dit-il. « l’Etat ne nous a pas dédommagés et la croissance démographique aggrave actuellement la situation » .

Djou déplore également que la SOGB a bafoué leurs sites sacrés. « Aujourd’hui, pour masquer cette action aberrante, elle parle de ”sites sacrés actifs” pour dire qu’elle ne peut pas détruire ses plantations au profit de simples manifestations culturelles ».

Pour la SOGB, aucune extension supplémentaire n’a été faite. Sa directeur générale a rappelé que la société détient un bail emphytéotique signé en 1995 que la superficie qu’il lui a concédé est bel et bien 34 712 ha.

Ouattara Nanakan, directeur du Foncier rural au Ministère de l’agriculture et du développement rural, explique que le bornage contradictoire relève du fait que les outils de mesures utilisés au moment de la concession provisoire en 1974 étaient de faible précision par rapport à ceux utilisés en 1983 au moment de l’immatriculation.

« La preuve en est que ces populations n’ont été déplacées qu’une fois » dit-il.

Ouattara dit à Mongabay que les procédures de l’immatriculation et les titres fonciers ont été créés sans qu’il y ait une quelconque opposition et que l’installation de la SOGB n’a pas violé les textes de 1932 — les règlements coloniaux étaient et sont toujours en vigueur. Il affirme en effet que les villageois ont été informés et que l’Etat a suivi les mêmes processus que dans l’installation des autres unités agro-industrielles partout en Côte d’Ivoire.

« Néanmoins, si ces communautés de villages déplacés ont des preuves que l’Etat ne les a pas indemnisées conformément aux textes de loi en vigueur au moment de l’installation de cette société, elles peuvent toujours saisir la commission de contrôle des opérations immobilières de l’Etat au ministère du budget », dit-il.

Néanmoins, Djou fait savoir que les communautés riveraines ont toujours exposé leurs préoccupations aux autorités habilitées mais en vain.

La certification RSPO malgré tout

Un des principes et critères de la norme RSPO est que le droit d’exploiter la terre doit être démontré et ne doit pas être légitimement contesté par les populations locales pouvant prouver leurs droits légaux, coutumiers ou d’exploitation.

« En plus du manque criant de terres, nous sommes toujours menacés par les inondations causées par les drainages, menacée par la pollution causée par des déchets provenant des usines de production de l’huile de palme et de caoutchouc », raconte Djou.

Djou explique que ces eaux polluées ont un impact négatif sur les poissons, sur les cultures vivrières et que les plantations de cacao de la population riveraine sont en train de mourir à petit feu. « La vie est devenue compliquée davantage avec l’occupation des bas-fonds pour ses cultures de palmier à l’huile, Il n’y a plus assez d’espace pour cultiver du riz, notre aliment de base ».

Zeeneeshri Ramadass, responsable de la communication Asie-Pacifique RSPO, dit à Mongabay que la RSPO n’a jusqu’à ce jour reçu aucune plainte ou rapport de grief concernant les opérations de la SOGB. Au cas contraire, le secrétariat de la RSPO peut annuler, révoquer ou retirer les certificats émis par un auditeur indépendant (organisme de certification) si une plainte officielle est enregistrée dans le système de plaintes de la RSPO.

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