Coopération Océan Indien – Quelles priorités pour Madagascar ?

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Photo : L' Express de Madagascar
Express de Madagascar | 14 mai 2023

COOPÉRATION OCÉAN INDIEN – Quelles priorités pour Madagascar ?

Madagascar accueillera la 37ème Session ordinaire du Conseil des ministres de la Commission de l’océan Indien (COI) au Centre de Conférences International d’Ivato le 17 mai prochain. Occasion pour l’Express de Madagascar de réaliser un focus sur les priorités de la Grande île dans l’espace indianocéanique.

Aux termes de sa fin du mandat à la présidence de la Commission de l’océan Indien, Madagascar va abriter prochainement le sommet de l’organisation sous-régionale et passera le flambeau de la présidence tournante à l’île Maurice. Les ministres des Affaires étrangères des pays membres de la COI, à savoir les Comores, Madagascar, la France, l’île Maurice et les Seychelles seront donc présents dans la capitale malgache pour prendre part à cet événement, tout comme les partenaires et membres observateurs de la Commission de l’océan Indien, en l’occurrence l’Union européenne, l’Agence Française de Développement, l’Organisation des Nations Unies, la Banque Mondiale, la Chine, l’Inde et le Japon.

Cette 37ème Session ordinaire sera pour la ministre de Affaires étrangères, Yvette Sylla, l’occasion de dresser le bilan de Madagascar à la présidence de la COI mais également de rappeler les objectifs et les priorités de la Grande Ile dans le cadre de sa coopération avec les îles voisines. Parmi les dossiers auxquels Madagascar accorde un intérêt de premier ordre, notons la sécurité multiforme (alimentaire, sanitaire et maritime surtout), le tourisme, l’économie bleue, les échanges intrarégionaux, la recherche, l’éducation et la formation.

Ainsi, Madagascar a toujours souligné l’importance de la pérennisation du Programme régional de sécurité alimentaire et nutritionnelle (PRESAN), eu égard, d’une part, aux conséquences inévitables de la crise sanitaire et, d’autre part, aux effets du dérèglement climatique sur la productivité au niveau de la région, ainsi que sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle, à l’échelle nationale et régionale. D’où l’appel réitéré en faveur de la promotion, de la production et la consommation des produits locaux et régionaux.

Pour rappel, Madagascar est signataire, à Victoria le 10 janvier 1984, de l’Accord Général de Coopération entre les États membres, acte fondateur de la COI. Les actions de la Commission s’articulent autour des principes de la solidarité et l’égalité souveraine des états membres dans la défense des intérêts communs. Au même titre que les autres États membres, le pays bénéficie des programmes et projets régionaux de la Commission qui sont soutenus par les partenaires internationaux de l’Organisation. On en recense plus de 70 depuis 1987 pour un montant total dépassant les 400 millions d’euros.

Ces projets contribuent notamment à la défense des littoraux et des eaux territoriales de la région, à la gestion durable des ressources et pour favoriser une plus grande résilience au changement climatique. Ils portent également sur la prévention et la lutte contre les menaces sanitaires en matière de santé animale et humaine. Parmi les projets phares en cours de la COI figurent la mise en place du Centre Régional de Fusion d’Informations Maritimes (CRFIM) dont Madagascar abrite le siège. Centre de référence régional en matière d’échange et de partage d’informations, il contribue de manière significative à la lutte contre la pêche illégale, non déclarée et non règlementée (INN) et contre les crimes transnationaux organisés en mer tels que les trafics de ressources naturelles et de substances illicites, ou la traite d’êtres humains par voie maritime. En outre, les Etats membres sont convaincus que Madagascar devrait être le grenier de l’océan Indien.

Du côté du ministère des Affaires étrangères, on tient à souligner que la Direction de l’Intégration Régionale joue un rôle majeur dans la mise en œuvre de la politique étrangère du pays ; ceci en sa qualité de coordonnateur et d’interface visant à d’optimiser l’appartenance de Madagascar aux groupements régionaux dont la COI. Au regard de la diversité des domaines que touche cette coopération régionale, cette coordination se fait, d’une manière générale, avec l’ensemble des départements techniques ministé­riels, au sein de diverses structures regroupant acteurs publics et secteur privé, et, plus spécifiquement, avec les ministères en charge du Commerce, de l’Industrie et des Finances.

Grenier de l’océan Indien : un objectif à matérialiser

Représentant plus de 90% des terres cultivables des pays membres de la COI, dont une forte proportion encore inexploitée, Madagascar a tout pour s’imposer comme le grenier de l’océan Indien. Mais le projet tarde à aboutir. Pourtant, il y a dix ans ont été jetées les bases d’une organisation de la production agricole à Madagascar afin d’y développer les cultures répondant aux besoins des pays de la région, notamment du riz, du maïs, de l’oignon et des grains.

Force est cependant de remarquer que pour le moment, les exportations à l’intérieur de la COI ne représentent qu’environ 5% du total des échanges. La marge de progression est donc très importante. Trois régions malgaches ont été identifiées comme susceptibles de satisfaire aux besoins des autres îles : Sofia, Vakinankaratra et Menabe.

Mais le projet de faire de Madagascar le grenier de l’océan Indien n’a pas non plus que des partisans. Des organisations de la société civile soutiennent qu’il faudrait d’abord s’accorder sur certains points comme la manière d’exploiter les terres agricoles, les contrats à passer avec les petits exploitants locaux, les avantages à accorder aux grandes entreprises d’agribusiness… Mais il y a aussi des producteurs, notamment ceux de La Réunion, qui ne voient pas d’un bon œil les importations de produits agricoles en provenance de Madagascar qui arrivent sur le marché à un prix inférieurs aux coûts de production locaux. A Mayotte également, le problème a été soulevé.

Dans une note conceptuelle sur le projet régional de sécurité alimentaire et la promotion de la production agricole à Madagascar, la COI rappelle la nécessité de surmonter ces obstacles tout en soulignant que pour atteindre les objectifs fixés, il faudrait s’attaquer à la faiblesse de la corrélation entre recherche-vulgarisation-producteur, la faiblesse du système de commercialisation, les difficultés d’accès aux zones de production, l’irrégularité des précipitations, la faiblesse des investissements dans l’agro-industrie, la destruction saisonnière des grands espaces par les feux de végétation, la lenteur de l’introduction des techniques appropriées à cause de l’insuffisance de techniciens de proximité, la dépendance excessive vis-à-vis des intrants, des équipements et des pièces de rechange importés.

En somme, le défi ne sera pas aisé à réaliser. Mais les autorités malgaches affichement une ferme volonté d’aller de l’avant. L’année dernière, lors de la conférence nationale pour l’élaboration de la stratégie nationale visant l’autosuffisance alimentaire, le Président Andry Rajoelina avait déclaré : « Il y a quelques années, Madagascar était le grenier rizicole de l’Océan Indien. Nous allons faire en sorte de retrouver ce statut ».

Du côté du ministère de l’Agriculture et de l’élevage, on insiste sur le fait que des progrès notables ont déjà été enregistrés, à l’instar de la mise en route du Programme régional de sécurité alimentaire et nutritionnelle, dont l’unité de coordination est basée à Madagascar, ainsi que l’ouverture du laboratoire des plantes et de serres spécialisées au sein du FOFIFA, l’institution malgache de recherche agricole, grâce au Programme Régional SANOI (Appui à la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle dans l’océan Indien), financé par l’Union Européenne et mis en œuvre en partenariat avec la COI. Ce département ministériel note également que la Grande île a pris l’engagement d’améliorer sa production et de respecter les normes, notamment phytosanitaires. À cet effet, des collaborations, notamment techniques, sont en train de se formaliser avec les autres pays membres de la COI.

Bonnes perspectives pour les IÎes vanilles

Les Iles Vanille sont vues comme l’un des programmes sous-régionaux les plus prometteurs. Rappelons que c’était lors du 6ème Forum Economique des Iles de l’océan Indien, en août 2010, qu’a été adoptée la résolution pour promouvoir ensemble la destination océan Indien à travers un label commun. La COI est chargée, dans le cadre du partenariat avec l’Union des Chambres de Commerce et d’Industrie des Iles de l’Océan Indien (UCCIOI), de veiller à la mise en œuvre de cette résolution.

L’association regroupe 6 îles de l’océan Indien : Les Seychelles, La Réunion, Mayotte, Comores, Madagascar et Maurice. Le concept est développé pour renforcer les actions touristiques (transports et partenariats) et l’attractivité de la zone océan Indien et faciliter la mise en œuvre d’actions communes entre les îles. L’association est actuellement présidée par Madagascar qui souligne que sa priorité en matière d’intégration touristique régionale est d’accélérer la réalisation des projets comme la facilitation des visas et transport entre les îles, le développement du tourisme de croisière et des marchés de niche et le renforcement des compétences.

D’après le ministère du Tourisme de Madagascar, les Iles Vanilles ont de beaux jours devant elles. La relance du tourisme dans la sous-région du sud-ouest de l’océan Indien est bien entamée et les membres de l’association partagent la même ambition de booster la notoriété et la compétitivité de la destination. « L’un des principaux objectifs est qu’un touriste visite au minimum deux îles et non une seule durant son passage », a aussi expliqué le ministre du Tourisme Joël Randriamandranto.

Hary Razafy, jeune opérateur touristique, estime également que les Iles Vanilles ont un rôle de premier plan à jouer pour faire de la région COI une destination leader au niveau mondial. « Les professionnels du tourisme ont bien conscience que l’essor touristique de Madagascar, de La Réunion, de Maurice, des Seychelles, des Comores, et de Mayotte doit passer par la mise en commun de moyens et de savoir-faire spécifiques. Cela permettait non seulement de créer de nouveaux produits complémentaires de ceux existants mais aussi de répondre aux attentes de nouvelles clientèles », ajoute-t-elle.

Mais les dirigeants des Iles Vanille avancent également l’argument selon lequel, visiter plusieurs îles lors d’un même voyage diminue les impacts environnementaux pour une meilleure préservation des écosystèmes somptueux mais fragiles de la région. La vanille, élément naturel, gastronomique et touristique commun aux îles de l’océan Indien a donc réussi à servir de support pour lancer une marque qui renforce la notoriété des destinations mais aussi pour les promouvoir à l’international.

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