PAC : la Cour des comptes européenne inquiète quant aux risques de fraude et d’accaparement illégal des terres

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Le rapport a mis en évidence une série de cas où des bénéficiaires ont omis de divulguer des informations pertinentes ou ont créé artificiellement des conditions pour satisfaire aux critères d’éligibilité. [SHUTTERSTOCK/FROMMERZ]

Euractiv | 5 juillet 2022

PAC : la Cour des comptes européenne inquiète quant aux risques de fraude et d’accaparement illégal des terres

Par : Natasha Foote et Yaroslava Bukhta | EURACTIV.com | translated by Anne-Sophie Gayet

Selon un nouveau rapport de la Cour des comptes européenne (CCE), le manque de contrôle rend le programme de subventions agricoles de l’UE vulnérable aux pratiques frauduleuses telles que l’accaparement illégal de terres. Les auditeurs de la CCE appellent notamment la Commission européenne à investir dans les technologies numériques pour prévenir et détecter la fraude.

Le rapport, présenté par la Cour des comptes européenne lundi (4 juillet), a étudié les risques de fraude dans le cadre de la Politique agricole commune (PAC).

Il met notamment en évidence une série de cas où des bénéficiaires ont omis de divulguer des informations pertinentes ou ont créé artificiellement des conditions pour satisfaire aux critères d’éligibilité afin de bénéficier de fonds de manière indue.

Selon les données fournies par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), l’impact financier des irrégularités frauduleuses signalées pour la PAC en 2016-2020 s’est élevé à 0,09 % des 262 milliards d’euros de dépenses totales de la PAC.

L’un des principaux risques de fraude avec la PAC est la question de l’accaparement des terres, qui se pose depuis longtemps déjà et qui implique la concentration des terres agricoles et des subventions de la PAC entre les mains de grandes entreprises et d’investisseurs, en particulier dans les zones montagneuses et les États membres d’Europe de l’Est.

Ce phénomène s’accompagne souvent de pratiques frauduleuses, telles que la falsification de documents, la coercition, l’utilisation d’une influence politique ou d’informations privilégiées, le détournement de procédures ou le versement de pots-de-vin.

« Étant donné que les systèmes de contrôle de la PAC permettent difficilement de surestimer la superficie éligible, les fraudeurs ciblent souvent les terres sans propriétaire actif », expliquent les auditeurs, ajoutant que cela peut être le cas pour des terres publiques ou privées dont les propriétaires ne sont pas clairement identifiés.

La législation relative à la PAC ne définit pas le concept de « terres à la disposition de l’agriculteur » et n’exige pas non plus des agriculteurs qu’ils fournissent la preuve de leur droit sur les terres lorsqu’ils soumettent une demande d’aide, peut-on lire dans le rapport, qui critique le fait que cette question relève du pouvoir législatif de l’État membre.

« Il est très important d’agir sur la question de l’accaparement des terres afin de s’assurer que les fonds de la PAC vont aux bénéficiaires légitimes », ont confié les auditeurs aux journalistes, ajoutant que cette question sur la propriété et le contrôle des terres « ne devrait pas être considérée comme une compétence purement nationale, car l’accaparement des terres est utilisé pour détourner les fonds de l’UE de leurs objectifs initiaux et fragilise la PAC ».

Récemment, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a attiré l’attention sur cette question en statuant que lorsqu’un terrain est revendiqué par son propriétaire et par un tiers qui l’utilise sans base légale, le terrain est considéré comme étant à la disposition du propriétaire.

Cependant, selon Nikolaos Milionis, le membre de la CCE qui a dirigé l’audit, la DG AGRI « n’a pas suffisamment traité » la question de l’accaparement des terres, expliquant que l’exécutif européen y voyait surtout une question d’État de droit dans les États membres.

Il est temps de creuser davantage

Dans le même temps, les auditeurs ont averti que le risque de fraude est directement proportionnel à la complexité de la PAC.

« Nous avons observé que le risque de fraude est plus important dans les domaines de dépenses soumis à des conditions d’éligibilité plus complexes », a déclaré M. Milionis, précisant que le problème est pire dans le domaine du développement rural et des mesures spécifiques de marché.

Sur la base de l’audit, l’une des deux principales recommandations est que la Commission « acquière et partage une connaissance plus approfondie des risques et des mesures de fraude dans les dépenses de la PAC ».

« En particulier, la Commission devrait clarifier le rôle des organismes de certification dans l’évaluation des mesures antifraude des organismes payeurs et examiner comment ces derniers mettent en œuvre les nouvelles orientations visant à vérifier si les terres sont légalement à la disposition de l’agriculteur », ont indiqué les auditeurs.

La deuxième recommandation fait référence à l’introduction de technologies pour une surveillance plus efficace des systèmes de fraude potentiels, notamment des outils de détection de la fraude tels qu’Arachne et le partage des meilleures pratiques en matière d’intelligence artificielle et d’apprentissage automatique pour identifier les modes de fraude.

« La lutte contre la fraude n’est pas la même que celle contre les erreurs. Des systèmes de contrôle solides aident, mais vous devez également développer une approche plus proactive pour détecter la fraude », ont déclaré les auditeurs, appelant l’exécutif européen à promouvoir une « culture de la vigilance » soutenue par les nouvelles technologies pour détecter les cas de fraude éventuels.

« Il ne suffit pas d’agir sur les cas qui vous sont signalés ou qui sont repris par les médias. Vous devez également être en mesure de détecter les fraudes et de vous assurer que les cas suspects feront l’objet d’une enquête rapide. À terme, vos actions devraient dissuader les potentiels  fraudeurs», ont-ils souligné.

« Grâce aux actions de la Commission, l’OLAF et maintenant le Parquet européen, doivent superviser les progrès et apporter des corrections lorsque des déficiences sont détectées », conclut le rapport, ajoutant que la Commission a un « rôle clé à jouer dans le développement de nouvelles technologies pour contrôler les dépenses agricoles ».
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