Accaparement de terres : La SIAT doit revoir sa copie en Côte d'Ivoire

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ActionAid France | 24 septembre 2019

Accaparement de terres
La SIAT doit revoir sa copie en Côte d'Ivoire


Une entreprise belge s'est lancée dans la monoculture d’hévéas sur leurs terres... sans leur consentement !

Les habitantes et habitants de Groumania, en Côte d'Ivoire, ont besoin de vous pour se faire entendre alors qu'une nouvelle étude d'impact est annoncée...

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A l'origine du bras de fer

Cultivé pour la production de latex principalement utilisé dans l'industrie pneumatique, l’hévéa se répand en Afrique et notamment en Côte d’Ivoire où 600000 hectares sont déjà couverts de plantations. C’est dans ce contexte que des habitantes et habitants du centre du pays ont engagé un bras de fer avec la Compagnie Hévéicole de Prikro : une filiale de la Société d'Investissement pour l'Agriculture Tropicale (SIAT) à qui le gouvernement ivoirien a cédé 11000 hectares de terres.

Aujourd’hui, l’Association des Ressortissants de Groumania, qui représente des paysans et paysannes d’un des 7 villages, cherche un soutien international pour se faire entendre par la multinationale belge.

Car non seulement la SIAT est loin d'avoir réalisé les investissements promis aux communautés (infrastructures, soutien aux productions vivrières...), qui ne compenseront jamais la perte de l’accès aux terres, mais elle a lancé le projet sans obtenir le consentement libre, informé et préalable des populations concernées.

Tout récemment, la SIAT a finalement annoncé le lancement d'une nouvelle étude d'impact en 2020. Cette fois, tiendra-t-elle ses promesses ?

Des milliers d’hectares attribués sans transparence

Les terres concédées à la SIAT se trouvent dans le centre-est du pays, à environ 300 km d’Abidjan. La moitié d'entre elles avaient déjà été exploitées par la Société d'État pour des plantations de canne à sucre entre 1979 et 1982, avec l'accord des communautés villageoises qui ont repris leurs activités agricoles à la fin du projet et affirment ne jamais avoir cédé ces terres.

En septembre 2013, ces 5 500 hectares et 5 500 hectares supplémentaires ont été mis à la disposition de la SIAT par l’État ivoirien, qui fait valoir un transfert de propriété de l'ancienne concession sucrière, sans pour autant apporter de documents attestant cette cession.

Mais avant de signer cet accord et avant de lancer les activités, la SIAT et l’État ivoirien auraient dû s’assurer du consentement libre, informé et préalable de l’ensemble des usagers et usagères des terres.

En l’absence de ce consentement, il s'agit d'un accaparement de terres.

Et dans les 7 villages concernés par la plantation d'hévéas de la SIAT, les griefs d’une partie importante et grandissante de la population semblent avoir été superbement ignorés.

La SIAT affirme avoir consulté la population. Elle a bien fait réaliser une étude d’impact sociale et environnementale mais celle-ci n’a été finalisée qu’en juin 2016, soit près de 3 ans après la signature de l’accord entre la SIAT et le gouvernement ivoirien.

De surcroît, selon les informations disponibles dans le résumé non-technique de cette étude (l’étude complète n’étant toujours pas disponible), les consultations des populations ont eu lieu en 2014, c’est-à-dire après la signature de l’accord de 2013.

Dès lors, ce processus n’a pas pu permettre aux communautés de se prononcer en connaissance de cause et de fournir un consentement préalable au projet.

Ceci est en contradiction flagrante avec l’esprit et la lettre de la Déclaration de Tirana.

Adoptée en 2011 par la Coalition internationale pour l'accès à la terre avec la participation d'ONG, d'agences des Nations Unies et de la Banque Mondiale, la Déclaration de Tirana dénonce comme un accaparement de terres toute acquisition de terres à grande échelle qui ne respecte pas le principe de Consentement Libre, Informé et Préalable (CLIP) des communautés concernées.

Sans consentement, c’est un accaparement de terres

Pour couper court aux protestations, la SIAT prétend que le projet de plantation d’hévéas a reçu le soutien unanime des habitant·e·s.

C’est ce que prétend l’étude d’impact environnemental et social de juin 2016 mais dans un droit de réponse publié en septembre 2018 par l'entreprise, suite à des informations sur le conflit dans la presse, la SIAT déplore l’opposition d’une partie de la communauté au projet et notamment des Andohs qui habitent la région.

La SIAT ne peut affirmer avoir obtenu le consentement des communautés alors qu’elle reconnaît qu’une partie de la population et de ses représentant·e·s coutumier·ère·s s’y est toujours opposée.

D'autre part les principes internationalement reconnus du consentement libre, informée et préalable des populations impliquent également la possibilité de se rétracter si les activités changent de nature ou si de nouvelles informations font surface.

Aujourd’hui, les habitantes et habitants des 7 villages touchés par le projet estiment justement qu'il ne correspond plus à la présentation qu’en avait fait la SIAT.

Sur les 8000 emplois directs annoncés, seuls 43 postes permanents ont été créés, ainsi que 980 emplois précaires et temporaires. Quant aux infrastructures de santé et d’éducation, alors qu’en 2013 l'entreprise annonçait qu’elle allait construire ou réhabiliter 6 écoles, elle semble s’être pour l’instant contentée de réparations du centre de santé de Prikro, et aucun·e enfant n’est scolarisé·e selon le Rapport de Développement Durable 2018 de la SIAT.

Tensions et violences

Cette absence de transparence et de consentement a entraîné des tensions importantes. Ainsi en 2015, l’incendie de tracteurs et la destruction d’hévéas ont été attribués aux habitant·e·s opposées au projet. La gendarmerie a répondu par une intervention musclée qui a dégénéré en affrontements violents, se soldant selon nos informations par deux morts, de nombreux·ses blessé·e·s et des arrestations.

La SIAT doit revoir sa copie !

Tout récemment, la SIAT a finalement annoncé le lancement d'une nouvelle étude d'impact en 2020. Pourtant, selon nos informations, les opposant∙e∙s et leurs représentant∙e∙s n’en ont pas été informé, ni été invité∙e∙s à se prononcer. Ils et elles demandent donc un soutien international pour pousser la SIAT à mener une consultation respectant enfin les normes internationales en matière de consentement libre, informé et préalable.

Avec nos partenaires de l’Association des Ressortissants de Groumania, et les associations Grain et SOS Faim, nous soutenons la population locale face à la SIAT. Notre courrier du 21 août 2019 étant resté sans réponse, nous vous invitons à rejoindre notre mobilisation.

Joignez votre voix à la leur !

► LIRE LA LETTRE DE PETITION

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