La Cour européenne des droits de l’Homme contrainte d’explorer le grenier à blé ukrainien

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Le Soir | 23/05/2018

La Cour européenne des droits de l’Homme contrainte d’explorer le grenier à blé ukrainien

MARC METDEPENNINGEN

L’interdiction de vendre ou d’acheter des terres agricoles depuis la fin du communisme est une atteinte au droit à la propriété, estiment les juges de Strasbourg.

Un arrêt de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), rendu ce mardi, a contraint les juges basés à Strasbourg de se plonger dans la politique agricole de l’Ukraine.

Deux propriétaires terriens entendaient voir reconnaître que leur « droit à la propriété », garanti par l’article 1 du Protocole 1 de la Convention européenne des Droits de l’Homme ne pouvait souffrir du « moratoire agricole » décidé en 1991 par le gouvernement ukrainien qui décida d’interdire l’achat ou la vente de terres agricoles.

« Grenier à blé »

La « désoviétisation » de l’Ukraine avait entraîné le démantèlement des kolkhozes et sovkhozes où s’organisait la production collective des céréales et des animaux. Les anciens travailleurs de ces fermes d’Etat se virent attribuer des parcelles d’une étendue moyenne de 3,5 hectares. L’objectif de l’Ukraine, à cette époque, était de protéger les populations rurales de la paupérisation, d’éviter les concentrations de terres entre les mains de groupes étrangers ou à vocation capitalistique, et de garantir la pérennité des cultures dans ce qui fut toujours, avec 42 millions d’hectares de terres labourables (dont 12.000 non exploitées) le « grenier à blé » de l’Europe de l’Est.

Sofyia Zelenchuk et Viktor Tsytsyura soutenaient que l’héritage des terres dévolues à leurs parents devait leur permettre, à eux devenus citadins, d’exercer leurs pleins droits de propriétaires et de pouvoir les vendre. Zelenchuk et Tsytsyra avaient tous deux été contraints, à défaut de vouloir cultiver eux-mêmes leurs lopins de terre, de louer leurs biens fonciers à de grandes entreprises, contre un loyer en nature (des graines ou de l’huile de tournesol) et une somme mensuelle de 20 à 36 euros l’hectare.

Comme le FMI...

Dans sa décision, la CEDH constate la violation des droits à la propriété des deux requérants. Si elle reconnaît à l’Ukraine le droit de mettre en place des mesures restrictives pour protéger l’intérêt général, elle relève que le « moratoire sur les terres » de 1991 devait expirer en 2005. Mais il a été renouvelé d’année en année, laissant sur leur faim de nombreuses entreprises privées désireuses de se débarrasser de l’obligation de louer les terres qu’elles exploitent à des milliers de petits propriétaires. L’Ukraine est donc priée d’ajuster sa législation.

Cet arrêt est aussi une première pour la CEDH. Son analyse, sous l’angle des droits de l’Homme, rejoint celle du FMI - Fonds Monétaire International - qui, sous l’angle économique, a enjoint à l’Ukraine d’ouvrir son marché foncier pour assurer la liberté des échanges et favoriser les investissements dans un secteur dont le développement est freiné par le morcellement des terres et le recours à un matériel obsolète.
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