Ruée mondiale vers les terres cultivables

Ouest-France | 09 décembre 2008

La Libye exploite 250 000 ha en Ukraine, en échange de pétrole et de gaz

La Chine, la Corée du Sud, les monarchies du Golfe et de grands groupes achètent ou louent dans le Tiers-Monde. Pour garantir leurs approvisionnements en nourriture. Ou faire des affaires.


Bruno RIPOCHE.

Madagascar sera-t-elle, dans quinze ans, un poids lourd du maïs en Afrique ? Peut-être, mais ses épis battront alors pavillon sud-coréen. Du moins si les autorités de la Grande Ile mènent à bien leur projet de concéder, pour 99 ans, plus d'un million d'hectares au conglomérat Daewoo.

Un accord de principe a été conclu à l'été dernier. L'entreprise coréenne investirait 6 milliards d'euros pour transformer des savanes de l'Ouest en terres à céréales, afin d'y récolter cinq millions de tonnes de maïs par an. Elle convertirait 300 000 autres hectares, dans le nord-est, en palmeraie pour produire de l'huile.

Daewoo et le gouvernement de Marc Ravalomanana, l'homme d'affaires élu président de Madagascar en 2002, ont encore à régler des détails comme... le loyer ! Et à vaincre des oppositions de plus en plus bruyantes (lire ci-après).

Avec l'aide des dirigeants

Le cas malgache n'est pas isolé. Une véritable ruée vers les terres agricoles est engagée à l'échelle mondiale. Prédateurs, la Chine, la Corée du Sud, les monarchies arabes du Golfe, effrayées par la récente flambée des matières premières agricoles ? Ces pays veulent assurer leur sécurité alimentaire à long terme. Pétrodollars et réserves en devises leur donnent les moyens d'acheter dans des pays pauvres, dont les gouvernants sont prêts à abandonner des pans entiers de souveraineté nationale.

Ainsi, le président indonésien, Susilo Bambang Yudhoyono, envisage-t-il de transformer la lointaine province de Papouasie (420 000 km2 et seulement 2,5 millions d'habitants) en immense plantation. Alors que Djakarta a connu, cette année, des émeutes de la faim, il est prêt à céder les futures récoltes de canne à sucre ou de sorgho à quiconque investira dans les routes, les centrales électriques et les systèmes d'irrigation. Bahreïn et l'Arabie saoudite sont intéressés pour y produire leurs besoins en riz basmati.

Les petits Émirats arabes unis contrôlent déjà 900 000 d'hectares au Pakistan. La Libye exploite 250 000 ha en Ukraine, en échange de pétrole et de gaz. La Corée du Sud lorgne sur autant en Mongolie. La Chine, vingt fois plus peuplée que la France pour trois fois seulement sa surface agricole, achète tous azimuts : de Cuba aux Philippines, de l'Australie au Kazakhstan.

Les États ne sont pas les seuls acteurs de cette course à la terre. Nombre d'investisseurs parient que la nourriture est l'or noir de demain. Des groupes suédois ont acheté un demi-million d'hectares en Russie, le britannique Landkom produit blé et colza sur 100 000 ha en Ukraine, la Deutsche Bank et l'américaine Goldman Sach investissent dans les élevages de poulets en Chine, la banque américaine Morgan Stanley et l'agro-industriel français Louis Dreyfus achètent des dizaines de milliers d'hectares au Brésil.

Pour tous ceux-là, le mobile n'est pas la sécurité. Mais le profit.

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