La Banque mondiale veut mettre l’accent sur les droits fonciers

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IPS | 10 avril 2013

La Banque mondiale veut mettre l’accent sur les droits fonciers

Carey L. Biron

WASHINGTON, 10 avr (IPS) - La Banque mondiale mettra un accent plus fort sur les questions de régime foncier et des investissements agricoles durables aux plans social et environnemental, a-t-elle annoncé lundi à Washington.

La banque, l'un des plus grands organismes de crédit de développement au monde, a également formellement réitéré sa préoccupation par rapport à "l’accaparement des terres" à grande échelle par des entreprises, qui a touché une grande partie de l'Afrique ces dernières années.

"Le Groupe de la Banque mondiale partage ces inquiétudes concernant les risques associés aux acquisitions foncières à grande échelle", a indiqué le président de la Banque mondiale, Jim Yong Kim, dans une déclaration faite lundi depuis le siège de la banque à Washington.

"La sécurisation de l'accès à la terre est cruciale pour des millions de personnes pauvres. Des politiques modernes, efficaces et transparentes sur les droits fonciers sont essentielles pour réduire la pauvreté et promouvoir la croissance, la production agricole, une meilleure nutrition et un développement durable".

Après des décennies au cours desquelles les secteurs agricoles ont été presque totalement ignorés par les investisseurs internationaux - y compris les donateurs bilatéraux et les organismes de crédit multilatéraux tels que la Banque mondiale - ces dernières années ont vu un regain d'intérêt chez tous les types d'investisseurs et d'institutions de développement.

Lundi, 8 avril, Kim a noté que la Banque mondiale, aussi, avait intensifié ses investissements liés à l'agriculture, mais a averti que "des efforts supplémentaires doivent être faits pour renforcer les capacités et les garanties relatives aux droits fonciers - et pour permettre à la société civile de tenir les gouvernements responsables".

En prélude à une conférence annuelle de quatre jours de la Banque mondiale sur la terre et la pauvreté à Washington, cette semaine, l'institution a déclaré qu'elle s'attendait à ce que la population mondiale augmente de deux milliards d’habitants d’ici à 2050, nécessitant une expansion de la production agricole mondiale de 70 pour cent.

Bien que l'institution réitère les appels de longue date pour de nouveaux investissements publics et privés significatifs dans les opérations agricoles à petite et à grande échelle à la fois, elle a prévenu que "l'investissement seul ne sera pas suffisant" pour atteindre ces niveaux.

Evoquant plutôt les prix grimpants des denrées alimentaires et du carburant couplés avec les incertitudes des changements climatiques qui se dessinent, la banque encourage l'adoption de normes nationales et internationales plus strictes sur les investissements et les droits fonciers comme un moyen d’aider les fermiers, à travers le monde, à accroître les rendements.

"Des terres exploitables manquent, et il y a trop de cas de spéculateurs et d’investisseurs sans scrupules qui exploitent les petits agriculteurs, les éleveurs et autres qui n'ont pas le pouvoir de se battre pour leurs droits", indique la banque. "Cela est particulièrement vrai dans les pays ayant de faibles systèmes de gouvernance foncière".

Ainsi, la banque renforcera désormais les efforts visant à améliorer la gouvernance foncière, la protection des droits des propriétaires terriens, et la promotion des politiques "qui reconnaissent toutes les formes de régime foncier et aident les femmes à jouir d'un traitement équitable dans l'obtention de droits fonciers".

Une discussion globale croissante

En particulier suite à la montée à la fois de la volatilité des prix des denrées alimentaires et de la demande pour les biocarburants à travers le monde au cours de la dernière demi-décennie, les terres agricoles sont devenues un produit de base lucratif pour des investisseurs internationaux, qui se sont focalisés notamment sur l'Afrique.

Selon des recherches menées en 2011 par la banque, quelque 60 millions d'hectares de terres dans les pays en développement ont été achetés ou loués par des investisseurs du secteur privé en 2009 seule, un processus qui s'est poursuivi. Dans beaucoup de cas, des organisations locales de la société civile ont prévenu que ces transactions se font avec la complicité des gouvernements et sans respecter les normes internationales sur l'inclusion des acteurs.

"Il y a eu récemment une tendance vers les gouvernements qui octroient de vastes terres aux investisseurs internationaux gratuitement ou à des taux préférentiels, pensant que ce faisant, cela accélérera le développement", a expliqué à IPS, Nicholas Minot, un chercheur principal à l'Institut international de recherche sur la politique alimentaire, un groupe de réflexion basé à Washington.

"Dans une certaine mesure, il y a une logique à cela, mais il existe une grande question de savoir si ces terres appartenaient au gouvernement ou si elles étaient précédemment occupées par de petits fermiers sans titres. Définir des droits fonciers sûrs pour les populations des zones rurales est une grande question mais critique".

Les organisateurs affirment que la conférence de cette semaine de la Banque mondiale sur la terre et la pauvreté - la 14ème - est la plus grande qu'ils aient jamais organisée, et comprend la participation des responsables gouvernementaux de plusieurs pays. Les responsables de la banque disent également que l'objectif de la conférence, intitulée "Aller vers une gouvernance foncière transparente", est indicatif d’une nouvelle discussion globale sur la question.

"Cette année, nous avons des dizaines de sessions sur les questions de gouvernance foncière, la transparence et l’application des Directives volontaires, qui n'auraient pas été aussi importantes il y a quatre ans", a indiqué à IPS, Jorge Munoz, un conseiller sur les régimes fonciers pour la Banque mondiale.

"Ce n'est pas un sujet nouveau pour la banque, mais il est devenu beaucoup plus important au niveau mondial – bien que certains pays soient clairement beaucoup plus intéressés à accroître la transparence pour améliorer la gouvernance foncière que d'autres".

Comme une partie de l’intérêt de la banque pour la question, Munoz met en exergue l’introduction par l’institution d'un nouvel outil avec lequel les gouvernements sont capables d'obtenir une analyse instantanée de leur régime foncier actuel et des lois connexes. Appelé Cadre d'évaluation de la gouvernance foncière, Munoz affirme que 33 pays ont commencé maintenant à l'utiliser.

En outre, la banque aide actuellement dans la mise en œuvre d’une nouvelle directive internationale, approuvée en mai sous les auspices de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) appelée Directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts dans le Contexte de la sécurité alimentaire nationale.
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  • 10 April 2013

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