"L’accaparement des terres est une grande préoccupation"

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Dennis Garrity : "La plupart de ces investisseurs fonciers ne savent pas du tout dans quoi ils s'embarquent. Ils prennent souvent l'approche simpliste d'utiliser une grande technologie pour développer de grandes plantations et les communautés traditionnelles sont tout simplement écartées. C’est totalement inacceptable."
Inter Press Service | 25.11.2011

"L’accaparement des terres est une grande préoccupation"

Manipadma Jena s’entretient avec DENNIS GARRITY, ambassadeur de l’UNCCD pour la lutte contre les terres arides

NEW DELHI, 24 nov (IPS) - Nommé ambassadeur pour la lutte contre les terres arides par la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification (UNCCD), lors de sa 10ème Conférence des parties (COP10) en Corée du Sud, en octobre, Dennis Garrity a pour mandat de mener une sensibilisation sur la dégradation des terres.

Ingénieur agronome des systèmes, Garrity a mis l'accent sur le développement de l’agriculture à petite échelle dans les tropiques.

Parlant au téléphone avec le correspondant d’IPS, Manipadma Jena, depuis Melbourne, en Australie, Garrity a décrit les mesures que l’UNCCD et les gouvernements doivent prendre sur des questions telles que l'accaparement des terres, la vulnérabilité aux changements climatiques et la perte de la biodiversité à travers les semences génétiquement modifiées.

Q: Quelles sont les politiques que les économies essentiellement agricoles, comme en Inde et en Afrique, devraient-elles adopter pour accorder aux terres arides l'importance méritée?

R: Des preuves scientifiques indiquent que les gouvernements sont en mesure d’obtenir des rendements plus élevés en investissant dans les terres arides que dans les zones non irriguées. Aujourd’hui nous avons des technologies comme 'l'agroforesterie' ou l’agriculture "à deux niveaux' où une grande partie de la production annuelle de cultures se fait sous une totale canopée d’espèces d'arbres spécifiques – bon nombre de ces arbres sont des 'arbres fertilisants' qui captent l'azote atmosphérique, dispensant ainsi de l'utilisation d'engrais chimiques. Cela avantage la production alimentaire et l'environnement.

Q: En quoi cette technologie est-elle rentable et favorable aux agriculteurs?

R: En Afrique, des millions d'hectares de terre ont été récupérés par les communautés d'agriculteurs à travers l'agroforesterie. Il y a un grand enthousiasme parce que non seulement elle complète les pratiques traditionnelles, mais aussi donne-t-elle des rendements élevés. Nous avons la preuve que cela peut se faire à grande échelle. Grâce à l'investissement, elle peut être étendue à des dizaines de millions d'agriculteurs en Afrique et en Inde.

Q: Il y a une perte croissante de terres arables pour ralentir la désertification et la dégradation des terres. Pourquoi ce fait-il que l’UNCCD se concentre plus sur les terres arides?

R: En fait, l'objectif de la Convention devrait être [la lutte contre] la désertification et la dégradation des terres dans toutes les zones agricoles. Le problème est que certains pays qui sont partis à la Convention ne sont pas à l’aise avec trop de contrôle en termes de leurs autres zones de déforestation; par exemple, la gestion des terres forestières qui ont été défrichées pour l'agriculture. Ces pays ont plaidé pour une interprétation étroite de la Convention et ont entravé sa capacité à traiter des questions de manière globale.

Q: Quels sont ces pays?

R: Principalement le Brésil. D'autres pays estiment également que tous les aspects de la dégradation des terres devraient être couverts puisqu’ils sont importants pour l'agriculture et la sécurité alimentaire mondiales. Le débat se poursuit d’une COP à une autre. Nous essayons de rendre largement disponibles les preuves de problèmes découlant de la gestion non durable des terres.

Q: Quelle serait la façon la plus productive pour traiter avec les régisseurs des terres arides qui sont les communautés elles-mêmes?

R: Les investissements devraient être orientés vers le renforcement des capacités du laboureur, des communautés, afin de leur permettre de gérer leurs propres terres. La participation des communautés à la base s'est avérée être une condition absolue et fondamentale dans les zones où la régénération des terres a été un succès.

Les investissements doivent se concentrer sur le renforcement des capacités et le partage des connaissances. Le renforcement du capital social est vraiment la clé d’une régénération future des terres.

Q: Les organisations non gouvernementales (ONG) peuvent-elles jouer un rôle important?

R: Un rôle absolument fondamental. Souvent les ONG peuvent être des connexions réseau entre les communautés. Elles peuvent fournir le genre de services et d’appui dont les communautés ont besoin. Je crois que le secrétariat de l’UNCCD reconnaît ce fait et cherche à mettre à contribution la communauté des ONG à un degré plus grand.

Le concept original de la régénération des terres dans l’UNCCD était directif, et pendant plusieurs années ce concept a dominé les débats et les interactions gouvernementales. Toutefois, ces dernières années, l'accent a vraiment été mis sur la participation des communautés à la base.

Q: L'accaparement des terres arides traditionnelles, particulièrement en Afrique, apparaît comme une préoccupation majeure croissante.

R: Les préoccupations autour de l'accaparement des terres, en Afrique particulièrement, sont bien fondées et très graves. De grandes zones sont en train d’être mises de côté ou vendues aux étrangers – bon nombre de ces régions sont peuplées par des communautés qui vivent de la terre et n'ont pas d’autres moyens de subsistance.

La plupart de ces investisseurs fonciers ne savent pas du tout dans quoi ils s'embarquent. Ils prennent souvent l'approche simpliste d'utiliser une grande technologie pour développer de grandes plantations et les communautés traditionnelles sont tout simplement écartées. C’est totalement inacceptable.

Q: Un avis émis à la COP 10 était que ces investisseurs épuiseraient les terres et partiraient tout simplement.

R: C'est certainement une possibilité, parce que les investisseurs étrangers n'ont aucun intérêt dans les terres. La possibilité d’une dégradation des terres à travers des pratiques non viables est très forte. Il est également fort probable qu'ils utilisent les investissements fonciers à des fins spéculatives.

Les gouvernements devraient protéger les communautés locales. Trop souvent, ces accords fonciers avec les gouvernements ne sont pas transparents - ce qui explique pourquoi l'accaparement des terres est devenu une grosse affaire.

Q: Lors de la COP 10, le secteur des entreprises a été encouragé de façon considérable comme étant des partenaires d'investissement dans les projets de lutte contre la désertification, la dégradation des terres et la sécheresse.

A: The private sector was invited to build their conscientiousness and their responsibility. Companies are involved in a gamut of agricultural activities - processing, marketing, distribution; they all need to be thinking of how their activities may be degrading or improving the land. With the private sector we are now searching for a certification process that in future can evaluate and monitor business-chains on their land regeneration impact.

Avec le secteur privé, nous recherchons maintenant un processus de certification qui peut à l’avenir évaluer et surveiller les chaînes d’entreprises sur leur impact en matière de régénération des terres.

C’était le premier effort de la Convention visant à engager un dialogue avec le Forum des entreprises (la COP 10 avait enregistré la participation de 90 entreprises); cela mettra du temps à se stabiliser en termes d’avantages pour les deux parties. (FIN/2011)
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