Madagascar : une société italienne accusée de détourner des terres à son seul profit

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Une entreprise italienne est accusé d’exploiter des terres sans en faire profiter la population locale. (Photo d’illustration COI)
Le Quotidien de La Réunion et de l'Océan indien | 25 octobre 2023

Madagascar : une société italienne accusée de détourner des terres à son seul profit

par Frédéric Banc

Implantée depuis quinze ans à Madagascar, la société italienne « Tozzi green » exploite de milliers d’hectares de soja, maïs ou jatropha. Des associations paysannes demandent aujourd’hui son départ, l’accusant de ne pas contribuer au développement local.

Dans un courrier daté du 13 octobre, un collectif rassemblant des organisations paysannes malgaches a interpellé l’Organisation de coopération et de développement économiques sur les agissements présumés opaques d’une entreprise italienne du secteur agro-industrielle.

Le collectif « Tany », appuyé dans sa démarche par l’association belge « Entraide et fraternité » et italienne « Action aid », accuse Tozzi green, présent dans la Grande île depuis 2010, d’exploiter des milliers d’hectares pour son seul profit. Près de quinze ans après le scandale des terres qui devaient être louées au groupe coréen Daewoo, une affaire qui avait entraîné la chute du président Marc Ravalamonana, Tany s’inquiète ainsi de l’exploitation intensive de quelque 11 000 hectares dans la région d’Ihorombe (centre) sans qu’aucune consultation préalable de la population n’ait été effectuée.

Compensations

Le premier bail de 2012 concerne près de 7 000 hectares répartis sur deux communes. Cette surface était initialement destinée à la culture de jatropha, pour des agrocarburants.

« Il n’y a eu pas les résultats escomptés. Tozzi green l’a remplacée par la culture de maïs à destination des producteurs de nourriture pour volailles. Le deuxième bail de près de 4 000 hectares a été signé en 2018. Empiétant sur les terres d’une troisième commune, il vise à étendre les plantations de maïs mais aussi à cultiver du géranium », détaille le collectif.

Sur ce territoire reculé du district d’Ihosy, » Tozzi green « cultive aussi du soja, revendiquant avoir revalorisé « plus de 6 300 hectares de sols dégradés et marginalisés ainsi soustraits à la désertification et transformés en sols agricoles fertiles ». Mais ces productions ne profitent pas aux communautés de villageois. « Les huiles essentielles, ce sont essentiellement des produits pour l’export », assure Mamy Rakotondrainibe du collectif Tany. « Comment peut-on parler de développement alors que c’est de l’exploitation », s’insurge-t-elle.

La société incriminée a obtenu des fonds de deux agences d’aide au développement, celles de Belgique et de Finlande. L’affaire fait des vagues dans les deux pays où des actions judiciaires sont en cours.

Des promesses non tenues

« On regrette les promesses non tenues en termes de développement. Elle est venue en disant que ça serait profitable à Madagascar, en faisant miroiter des emplois mais la plupart d’entre eux ne profitent pas à la population de la région », soutient-elle. « Quelque part, ses activités contribuent aujourd’hui à aggraver la sécurité alimentaire des Malgaches ».

Sur les trois communes d’Ambatolahy, de Satrokala et d’Andiolava, soit plus de 50 000 habitants, seulement une centaine d’emplois directs seraient attribués aux habitants de la région. « Les cadres sont des étrangers et quand ils sont Malgaches, ils viennent de Tana ». Outre le départ du groupe agro-industriel de la région, elle souhaite que soient versées des indemnités aux paysans lésés par l’occupation de leurs terres.

« Depuis plus de dix ans, les communautés locales protestent contre les concessions signées entre la société JTF Tozzi green et l’État et de l’absence d’information sur ces contrats », ajoute-t-elle en évoquant la difficulté pour les petits agriculteurs de prouver leur titre de propriété. « Les sommes versées comme dommages-intérêts seront utilisées pour des projets communautaires », assure Mamy Rakotondrainibe qui regrette le manque du dialogue entre les parties. Thomas Razafindremaka, défenseur des Droits de l’homme, a tenté de jouer les médiateurs mais il a été accusé d’escroquerie. Poursuivi, il doit être jugé ce jeudi.

Contactée à plusieurs reprises, l’entreprise Tozzi green n’a pas répondu.

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