Haït : l'accaparement des fermes agricoles, un calvaire pour les paysans

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« L’État doit frapper vite et fort » martèle Chavannes Jean-Baptiste
lenouvelliste.com | 2022-02-24

Plateau central : l'accaparement des fermes agricoles, un calvaire pour les  paysans

L'accaparement des fermes agricoles publiques et privées est un phénomène persistant observé quotidiennement dans le Plateau central. Il demeure l’une des préoccupations des citoyens. Ceux-ci ont mal au cœur de voir leurs biens subtilisés par des gens connus, souvent des voisins, des parents, des autorités civiles et politiques sans qu’il y ait une juste réparation à la hauteur du préjudice subi. L'expulsion accentue la pauvreté dans les campagnes et plonge des milliers de paysans fermiers et propriétaires dans le désarroi.

L'agriculture biologique constitue dans le Plateau central un secteur très important et une filière où s’activent des dizaines de milliers de paysans. Il connaît un développement qualitatif continu avec les techniques modernes comme le seuil, le mur sec, le «jaden pre kay», la stabulation… de plus en plus adoptées par les paysans pour limiter les dégâts causés par l'érosion et les insectes. Toutefois ce secteur qui contribue au développement économique du pays est confronté à un phénomène grandissant qui menace son existence. Il s’agit de la spoliation. Aujourd’hui, les paysans ne dorment plus que d’un œil à cause des bandes de spoliateurs qui ratissent les campagnes et effectuent des irruptions impromptues. Organisés, armés, ils bénéficient de la complicité des autorités locales et agissent au sein de réseaux où les rôles sont partagés.

« Il n’est plus possible d’élever un animal, de cultiver la terre dans notre localité à cause des voleurs et des spoliateurs », se plaignent des éléveurs de bétail menacés d'expulsion sur les fermes dans le département, lors d'un colloque organisé par différents secteurs sur l'habitation de Couime, dans la quatrième section Aguahédionde Rive droite.

« Beaucoup d’éleveurs ont ainsi été ruinés et de plus en plus de personnes ont peur d’investir dans l’élevage et l'agriculture biologique », s'est plaint Gubert Pierre, responsable de communication départementale de l'Institut national de réforme agraire (INARA), à l'occasion d'un colloque pour mieux lutter contre l'expulsion des gens de bien de terres.

« Les risques de désorganisation de ce secteur, a-t-il poursuivi, sont réels. Aussi, compte tenu de l’importance du secteur, l’État, grâce aux forces de sécurité, doit davantage prendre ce problème à bras-le-corps pour mettre hors d’état de nuire ces malfaiteurs ».

Invité à prendre la parole à ce colloque, le chef du parquet de Hinche, Me Edler Guillaume, a fait savoir que cette situation ne se stabilisera pas dans le contexte actuel sans une prise en charge par l’État. Me Guillaume promet que le parquet prendra des mesures répressives contre tous ceux impliqués dans ces activités réprimées et punies par la loi. Des dizaines de cas en un mois au parquet avec la complicité des autorités locales, s’exclame-t-il.

« Je suis l'avocat né des paysans », a-t-il lâché. Depuis mon installation au parquet de la juridiction, je pars en guerre contre tous ceux impliqués dans des actes répréhensibles, notamment les bandits qui tuent, pillent et ratissent dans les zones rurales. Je demande aux autorités policières et judiciaires de se laver leurs mains.

« Il y a un lien étroit entre les bandits et certaines autorités locales. Il y a trop de corrompus au timon des affaires de l'État pour association. C'est pourquoi, ils se sont érigés contre les paysans », a indiqué Philfrant St-Naré, ajoutant que les paysans Couime, Bassin-Bœuf, Papaye sont les principales victimes de ce phénomène qui est en pleine expansion à Hinche et ses environs. Nombreux sont les juges écroués à la prison civile de Hinche et quelques-uns sont recherchés activement par la police ».

C’est par des structures organisées que les paysans au Plateau central essayent de lutter contre les fauteurs de troubles (voleurs, spoliateurs...) qui, à l’époque, avaient surtout un soubassement culturel chez certains paysans. De nos jours, cela ne permet plus d’arrêter la nouvelle génération d'accapareurs qui utilisent des camions pour transporter les denrées, l'enlèvement, la séquestration et des armes à feu pour commettre leurs forfaits.

« Pour lutter contre le fléau, nous avons organisé des forums dans toutes les communes basés sur le principe de dialogue; la mise en place de comités de vigilance contre les spoliateurs, à l’image des comités de sécurité de proximité prônés par le chef du parquet de la juridiction de Hinche », a fait savoir Chavannes Jean-Baptiste, ajoutant que tous leurs efforts sont demeurés vains.

Pour lui, l’État doit penser également à prendre des mesures plus importantes contre les envahisseurs. M. Jean-Baptiste pense que ces mesures serait très dissuasives pour les accapareurs.

« Tout cela devrait aboutir à l’établissement d’une véritable task force pour résoudre ces conflits opposant de paisibles citoyens à des gens venus de l'extérieur. L’État doit frapper vite et fort au risque de voir tout le secteur disparaître dans le Centre malgré les efforts du parquet pour traquer ces malfrats et leurs complices dans les sections communales.

Auteur : Joram Moncher [email protected]

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