Cambodge. Face à Bolloré, l’ethnie Bunong pleure sa forêt

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Les Bunongs, qui considèrent les arbres centenaires comme des divinités, s’estiment spoliés de leur forêt ancestrale epa . EPA/MAK REMISSA
Ouest France | 4 juillet 2021

Cambodge. Face à Bolloré, l’ethnie Bunong pleure sa forêt

Les paysans cambodgiens ont été déboutés par le tribunal de Nanterre, dans une affaire d’accaparement de terres les opposant à l’homme d’affaires breton.

Ouest-France à Phnom Penh, François CAMPS

Coup dur pour l’ethnie Bunong. Vendredi dernier, 80 paysans de cette communauté animiste des hauts plateaux de l’est du Cambodge ont été déboutés par le tribunal judiciaire de Nanterre. Ils attaquaient le groupe Bolloré et la Compagnie du Cambodge dans une affaire d’accaparement de terres dans la province orientale du Mondolkiri.

Des plantations de caoutchouc

Les Bunongs, qui considèrent les arbres centenaires comme des divinités, s’estiment spoliés de leur forêt ancestrale, dont dépend leur mode de vie traditionnel et où se trouvaient leurs lieux de culte. Elle a disparu pour laisser place à des plantations de caoutchouc. "Leur expropriation les a aussi privés de moyens de subsistance"​, affirment leurs défenseurs.

L’histoire débute en 2008, lorsque le gouvernement cambodgien octroie près de 7 000 hectares de concession économique à la Socfin-KCD. Une joint-venture créée un an plus tôt par une entreprise locale et la société luxembourgeoise SocfinAsia, elle-même filiale minoritaire du groupe Bolloré.

Le cœur de l’affaire ? Déterminer la propriété de ces terres reculées. Si les Bunongs – environ 37 000 personnes – affirment y avoir toujours vécu, ils peinent à prouver leurs droits. D’autant que la plupart des documents fonciers ont été détruits par les Khmers rouges dans les années 1970.

Une action en justice auprès du TGI de Nanterre

En juillet 2015, après plusieurs tentatives, infructueuses, pour résoudre ce litige au Cambodge, 51 Bunongs (ils sont désormais 80) intentent une action en justice auprès du tribunal de grande instance de Nanterre. "La communauté n’avait plus confiance dans le système judiciaire cambodgien"​, avance Samin Ngach, responsable du dossier à l’association de défense des indigènes CIYA.

Six ans plus tard, la justice française vient de trancher : "Aucun des 80 demandeurs […] ne justifie d’un droit réel ou personnel pour exploiter les terres litigieuses" ​fait savoir la cour.

Amertume au Cambodge. "Nous sommes très déçus"​, déplore Samin Ngach. "Cette décision est basée sur des raisons injustifiées, ne prenant pas en compte le contexte du pays"​, lance de son côté Sek Sophorn, avocat-conseil des plaignants Bunongs au Cambodge.

En France, l’avocat des paysans Bunongs, Fiodor Rilov, a fait appel de la décision qu’il juge "stupéfiante et en décalage avec le droit international pour les peuples indigènes."
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