RDC : Attention, la loi agricole va changer

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La voix du Paysan Congolais |

Attention, la loi Agricole va changer

Le Sénat de la RDC a voté lundi 13 novembre 2017, la proposition de loi modifiant et complétant la Loi n°11/002 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à l’agriculture. Cette nouvelle proposition de la loi présentée en détail ci-dessous accorde notamment la possibilité à toute personne morale et physique sans distinction d’avoir accès à la terre destinée à l’agriculture. Cette proposition de loi a été renvoyée à l’Assemblée Nationale pour une seconde lecture.

A l’issue de l’examen minutieux, les sénateurs ont adopté article par article le projet de loi modifiant et complétant la Loi n°11/002 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à l’agriculture. En définitive, la structure de la loi comporte 4 articles. Il s’agit de: article 1er qui introduit les modifications des articles 11, 16, 17, 22, 41, 57, 61, 72 et 76; l’article 2 qui complète la loi en vigueur en insérant le litera 6 bis à l’article 3 et en créant les articles 55 bis et 55 ter, à la suite de l’intégration, dans le titre 3, d’un chapitre 2 bis, suivi du réaménagement conséquent du chapitre 3 et du chapitre 4 ;  l’article 3 qui abroge l’article 82 ; l’article 4 relatif à l’entrée en vigueur de la loi.

En substance, les principales modifications ont notamment pour objectifs : l’ouverture du secteur agricole à tous les opérateurs économiques, nationaux et étrangers ; la réduction, de 35 à 20 %, du taux d’imposition sur les revenus professionnels des exploitants agricoles industriels ; la promotion d’une classe moyenne congolaise; l’accès au Fonds national de développement agricole réservé aux Congolais ; l’exonération de l’impôt sur les revenus professionnels en faveur de l’exploitant agricole familial et de type familial  et la préservation des droits fonciers acquis.

Ainsi, l’article 16 aliéna a du chapitre 2 qui a soulevé de nombreuses inquiétudes auprès de la FEC, se présente de la manière suivante : « Les terres destinées à l’usage agricole sont concédées  aux exploitants, mises en valeur et retirées dans les conditions définies par la  loi. Toutefois, le requérant remplit les conditions ci-après : a) être une personne physique ou une personne morale de droits congolais, avoir une résidence, un domicile ou un siège social en RDC, présenter la preuve de son inscription au registre de commerce et de d crédit mobilier , s’il s’agit d’une personne exerçant le commerce, d) justifier de la capacité financière susceptible de supporter la charge ou qui implique la mise en valeur de la concession ».

Donc, l’article 16 tel que modifié donne à toute personne morale ou physique sans distinction la possibilité d’avoir accès aux terres destinées à l’agriculture alors que dans la Loi de 2011, l’article 16 exclut expressément les personnes physiques étrangères à l’éligibilité des droits portant sur les terres agricoles et leur participation au sein des sociétés.

A l’issue de la plénière, l’initiateur de cette proposition de loi de réforme de la Loi agricole, le sénateur Musendu Flore a déclaré à la presse : « Voici six ans que nous avions voté la Loi. Mais, elle a eu des difficultés à être mise en œuvre. Parce qu’un verrou avait été mis sur l’accès aux terres destinées à l’agriculture. Les étrangers qui entraient dans ce secteur ne pouvaient pas détenir plus de 50 % d’actions. Donc, la première des choses, ce que nous avons fait sauter ce verrou. Et nous espérons qu’avec ce mécanisme, nous pouvons appeler davantage les capitaux frais dans ce secteur ».

Il a poursuivi en disant que « la deuxième chose que nous avons fait de plus importante, c’est de renforcer les mécanismes de financement des Congolais dans le secteur de l’agriculture de sorte à ce que les Congolais puissent aussi être compétitifs dans ce secteur. Et nous avons ajouté une disposition très particulière, « c’est celle qui oblige le Gouvernement à prendre les mesures réglementaires endéans six mois. Toutes ces dispositions mises ensemble, nous visons à ce que, dans un délai assez court, le secteur puisse redécoller et que l’autosuffisance alimentaire puisse atteinte ».

Il a déclaré que « Nous nous sommes rendus compte en six ans que, la capacité financière des nationaux était assez faible pour relancer ce secteur. C’est pour cela que nous avons pensé qu’on pouvait faire la concession d’ouvertures. Une comparaison c’est le secteur minier. Voici aujourd’hui, plus d’une dizaine d’années que nous avons ouvert le secteur minier, et vous pouvez voir de vous-même, nous sommes passés de moins de 100.000 tonnes de cuivre par an, aujourd’hui à 1 million. Donc, nous voulons faire la même chose dans le secteur agricole…

Le Sénateur a conclu en disant que « Les dispositions sur le financement des Congolais, parce que le financement est exclusif pour les Congolais, ce sont ces dispositions qui pourront renforcer l’applicabilité de création de la classe moyenne congolaise, d’une part, et d’autre part, nous avons exonéré toute exploitation agricole familiale ou de type familial ».

Pour rappel, au lendemain de la promulgation de la Loi agricole par le Chef de l’Etat en 2011, la FEC a soulevé quelques inquiétudes concernant notamment les articles 16  et 82 dont certaines personnes pensaient qu’il s’agissait bien d’une autre « Zaïrianisation » qui ne disait pas son nom, mais qui était en fait une façon de déposséder les étrangers de l’usage de leurs terres. L’article 82 disposait que « le détenteur d’une concession agricole est tenu de se conformer aux dispositions de la présente loi dans les douze mois de son entrée en vigueur ».

C’est pour toutes ces raisons que la FEC a mal digéré cette loi dès sa promulgation et s’est battue pour obtenir la modification des articles incriminés. En tout cas au Sénat, on peut dire que la FEC a obtenu gain de cause en réussissant la modification des articles 16 et 82. La seconde bataille sera livrée à l’Assemblée Nationale. Est-ce que les députés vont aller dans le même sens que les Sénateurs ? Attendons voir.

Ente temps, les voix se lèvent déjà au sein de certaines organisations de la société civile contre les modifications proposées par le Sénat sur cette proposition de loi. En tête, il y a le CNONGD qui dans son alerte citoyenne, dit : «Non à la porte ouverte sur l’accaparement des terres agricoles en RDC ».

Les organisations paysannes telles que la CONAPAC, la COPACO et l’UNAGRICO n’ont pas du tout été concertées. La CONAPAC analyse actuellement en urgence l’ensemble des modifications avant de donner sa position. Nous aurons l’occasion de partager leurs points de vue prochainement en espérant qu’il ne soit pas trop tard pour qu’elles puissent encore influencer les débats à l’Assemblée Nationale comme en 2011.

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PROPOSITION DE LOI MODIFIANT ET COMPLETANT LA LOI N ° 11/022 DU 24 DECEMBRE 2011 PORTANT PRINCIPES FONDAMENTAUX RELATIFS A L’ AGRICULTURE

L’Assemblée nationale et le Sénat ont adopté ;

Le Président de la République promulgue la loi  dont la teneur suit :

Article 1e

Les articles 11, 16, 41, 57, 61 et 76 sont modifiés comme suit :

Article 11 :

Le ministre ayant l’agriculture dans ses attributions, en concertation avec les ministres ayant les affaires foncières et l’aménagement du territoire dans leurs attributions, fait procéder par région naturelle et par nature de culture ou par type d’exploitation aux études nécessaires à l’appréciation de la superficie à exploiter. ,

Article16 :

Les terres destinées à l’usage agricole sont concédées aux exploitants, mises en valeur et retirées dans les conditions définies par la loi

Toutefois, le requérant remplit, en outre, les conditions ci-après :

a) être une personne physique ou une personne morale de droit congolais ;

b) avoir une résidence, un domicile ou un siège social en République Démocratique du Congo;

c) présenter la preuve de son inscription au registre du commerce et du crédit mobilier, s’il s’agit d’une personne exerçant le commerce ;

d) justifier de la capacité financière susceptible de supporter la charge qu’implique la mise en valeur de la concession ;

e) produire une étude d’impact environnemental et sociale

Article 41 :

L’exploitant agricole qui ne peut accéder au circuit de distribution d’eau, d’énergie électrique ou des produits pétroliers peut se doter d’une source alternative d’approvisionnement.

La consommation à des fins d’exploitation agricole de l’eau et de l’énergie produites par l ‘exploitant lui-même est exonérée de tous droits, taxes et redevances.

L’exploitant agricole peut recourir à 1 ‘énergie bois et aux autres sources telles que le biocarburant, le biogaz et la biomasse, lorsque celles disponibles ne sont pas suffisantes pour les besoins des activités agricoles.

Article 57 :

Les ressources du Fonds sont constituées notamment des:

  1. redevances prélevées sur les produits agricoles et denrées alimentaires importés ;

  2. recettes du service de la quarantaine végétale ;

  3. allocations budgétaires de l’Etat ;

  4. dons et legs;

  5. contributions des bailleurs de fonds;

  6. revenus de la taxe sur la plus-value.

Un décret délibéré en Conseil des ministres détermine les produits agricoles et les denrées alimentaires importés passibles de la redevance du Fonds ainsi que le taux applicable.

Article 61

L’accès aux crédits du Fonds est soumis aux conditions particulières suivantes :

a) être un exploitant ou un regroupement d’exploitants agricoles congolais ;

b) être une personne morale de droit congolais dont les parts sociales ou les actions sont entièrement détenues par les nationaux ;

c) offrir des garanties de remboursement des capitaux empruntés ;

d) s’engager à affecter la totalité du crédit à l’activité agricole financée.

Article 76

Par dérogation au droit commun, les bénéfices et profits réalisés par l’exploitant agricole industriel sont assujettis à l’impôt sur le revenu professionnel au taux de vingt pourcent.

Les bénéfices et profits réalisés par l’exploitant agricole de type familial sont exonérés de l’impôt sur le revenu professionnel. L’exploitant agricole familial est exempté de l’impôt sur le revenu professionnel, conformément aux dispositions de l’article 202 point 1 de la Constitution.

Article 2

Sont insérés le litera 6 bis à l’article 3 ainsi que les articles 55 bis et 55 ter libellés comme suit :

Article 3, litera 6 bis

La communauté locale : une population traditionnellement organisée sur la base de la coutume et unie par le lien de solidarité clanique ou parentale qui fonde sa cohésion interne. Elle est caractérisée en outre par son attachement à un terroir déterminé.

Titre 3 : De la promotion agricole

Chapitre 2 bis : De l ‘association entre promoteur étranger et partenaires congolais.

Article 55 bis

Sauf preuve de carence avérée, dûment constatée par l’autorité compétente du Gouvernement ou de la Province, selon le cas, le promoteur étranger, personne physique, désireux d’investir dans le secteur agricole, est tenu de s’associer à un ou plusieurs congolais de son choix, dans le cadre d’un partenariat d’affaires librement négocié et conclu entre parties.

Art 55 ter

Les dispositions de l’art 55 bis ci-dessus sont applicables, mutatis mutandis, au promoteur étranger, personne morale, désireux de constituer une société de droit congolais, en vue d’une exploitation agricole.

Dans ce cas, les conditions et les modalités de constitution du capital sont déterminées, de commun accord, entre le promoteur étranger et les associés congolais. »

Article 3 :

Est supprimé, l’article 82.

Article 4 :

La présente loi entre en vigueur à la date de sa promulgation.

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