Burkina Faso: Mécontentement de producteurs - Le DG de Bagré pôle s'explique

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« Si on considère que moins de 11% de superficie attribués aux agro-investisseurs, c'est s'accaparer les terres, c'est une question d'appréciation, » affirme Joseph Martin Kaboré
L'Observatoire Paalga | 26 juin 2017

Burkina Faso: Mécontentement de producteurs - Le DG de Bagré pôle s'explique

Par Hadepté DA

Dans notre livraison du 22 juin dernier, nous titrions « Bagré : Des producteurs mécontents du pôle de « décroissance » ». En réaction à l'article, le directeur général du pôle de croissance de Bagré, Joseph Martin Kaboré, nous a accordé une interview le 23 juin 2017. Il a fait savoir que le projet n'est pas comptable de tous les griefs qui lui sont reprochés.

Le 14 juin 2017, nous avons rencontré des producteurs qui disent être désillusionnés par le pôle de croissance de Bagré. Que leur répondez-vous ?

Le pôle de croissance de Bagré a été créé en 2012 sous la forme d'une société d'économie mixte. Il a hérité du patrimoine de l'ancienne structure qu'est la maîtrise d'ouvrage de Bagré (MOB) qui date des années 1980. Naturellement, en tant que héritière de cette ancienne structure, Bagré pôle hérite du patrimoine dans son entièreté, c'est-à-dire des actifs mais aussi des passifs. En actif, c'est l'ensemble des infrastructures qui avaient été réalisées, à savoir le barrage et environ 3380 hectares. En passif, il y a tout le dispositif de mise en œuvre qui a commencé dans les années 1980 et qui a comporté des insuffisances. Bagré pôle a pour responsabilité de solder les passifs de l'ancienne institution qui avait été imaginée sur d'autres bases. Actuellement, le projet n'a distribué aucun mètre carré de superficie. C'est en janvier 2018 que nous attendons les premières superficies et les premiers paysans qui seront installés dans Bagré pôle.

Certains producteurs trouvent les superficies d'exploitation petites pourtant leurs familles s'agrandissent.

En son temps, selon certaines normes, des infrastructures, des terres ont été attribuées aux exploitants. Il leur était attribué 1000 m2 de superficie pour l'habitat. Cette superficie était destinée à l'habitat réel, mais à tout ce qu'un paysan peut faire en annexe pour améliorer ses revenus. Ils ont bénéficié également de 4000 m2 pour le maïs ; 1, 5 hectare de champ de brousse et 1 hectare de terre rizicole cultivable dans les aménagements modernes qui avaient été faits. Des producteurs qui estiment qu'ils ont moins d'un hectare, il peut effectivement exister ces cas dans la mesure où ce sont des terres qu'on distribue et certains peuvent tomber sur des espaces qui peuvent comporter des crevasses, des rocailles et ce qui est exactement exploitable peut éventuellement se limiter à 0,80 ou 0,90 hectare.

Ils déplorent aussi le fait que les superficies ne soient pas extensibles

Ce sont les champs exploitables pendant la saison pluvieuse qui peuvent l'être. Les terres aménagées ont des limites et ce qu'on donne, on essaie de compenser les besoins en production à travers l'intensification des rendements et des productions. C'est dans ce que tu as eu que tu dois maximiser et intensifier, mais aussi travailler à diversifier tes sources de revenu et non se focaliser uniquement sur la production agricole.

Que répondez-vous aux personnes qui affirment que les terres ne sont attribuées qu'aux agrobusinessmen ?

On ne cesse d'expliquer qu'actuellement Bagré pôle n'a attribué aucune superficie de terre. Ce sont des anciens aménagements qui sont actuellement gérés. Nous avons actuellement 3380 hectares en exploitation. Sur ces terres, seulement 300 hectares ont été distribués a des agro-investisseurs pilotes. Les 3080 hectares restants sont de type paysannat. Les superficies attribuées aux agro-investisseurs, c'est pour préfigurer le modèle économique que le projet actuel est en train de concevoir. Si vous faites la proportion, ça fait moins du 1/10e. Maintenant, si on considère que moins de 11% de superficie attribués aux agro-investisseurs, c'est s'accaparer les terres, c'est une question d'appréciation.

Un des producteurs, Moussa Ouédraogo, s'est plaint parce que le projet a confisqué sa parcelle pour y construire une école. Qu'en est-il au juste ?

Il s'agit des 4000 m2. C'est un domaine qui avait été attribué par la MOB dans les années 2005-2006 à l'Eglise catholique qui a demandé une superficie pour y construire une église. Sur cette superficie, une école est également construite. Le problème nous a été posé récemment, il y a moins de dix jours. Nous sommes déjà là-dessus. D'abord, pour retrouver les liens historiques, les conditions dans lesquelles le terrain a été vendu à l'Eglise, mais aussi, comment on a traité les propriétaires terriens à l'époque, quels étaient les termes de négociation.

La loi sur le quota genre prévoit que 30% des superficies soient affectés au profit des femmes. Bagré pôle respecte-t-il cette disposition?

La loi date de 2009. Toutes les terres avaient été distribuées. C'était dans les années 1980. Les dernières attributions ont eu lieu en 2009. Sauf une petite portion qui a été l'objet de conflit en 2010. Mais c'était prévu pour des gens. Actuellement, le pôle de croissance n'est pas reprochable de non-respect du quota parce qu'on n'a pas encore distribué de terre. Et nous nous apprêtons, sur les terres en cours d'aménagement, à respecter scrupuleusement le quota.

Les populations de la localité voyaient au projet une solution au chômage. Aujourd'hui, elles disent ne pas trouver d'emplois.

Quand vous avez de fortes attentes, souvent à la limite du réalisme, et quand elles sont confrontées à la réalité, la désillusion est plus grande. Autrement, on ne peut pas dire que rien n'est fait. Nous avons trois grands chantiers à Bagré. Chacun emploie au bas mot 350 ouvriers en plein régime. Les paysans, pour trouver des ouvriers en période de fort besoin de main-d'œuvre, en trouvent très rarement. Actuellement, à Bagré pôle, pour inciter certaines techniques de production, nous avons ce que nous appelons des champs écoles que nous développons pour participer à l'animation et à l'encadrement des populations. Pour nos champs écoles, nous sommes obligés chaque année d'aller chercher la main-d'œuvre dans d'autres zones parce que sur place on n'en trouve pas. D'ailleurs, la main-d'œuvre à Bagré est chère parce qu'on n'en trouve pas.

Les questions de la mévente des productions ainsi que le manque de l'engrais ont été posées. Avez-vous connaissance de ces préoccupations?

Il n'y a pas de mévente. Lorsque que vous y étiez (ndlr : le 14 juin), si vous cherchiez un sac de riz, vous n'en trouveriez pas. Pour le cas de l'engrais, le ministère de l'Agriculture, dans le temps, mettait à la disposition des producteurs de l'engrais subventionné. Au début, Bagré pôle en profitait. Mais comme ça ne suffit pas pour tous les producteurs du pays, la question s'est posée. Est-ce qu'il ne faut pas prioriser les producteurs les moins aisés? Et quand le ministère a commencé à prioriser pour mettre l'accent sur les producteurs beaucoup plus nécessiteux, nos producteurs ont été déclassés!

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