Un projet de loi pour restreindre l'acquisition de terres par des étrangers

LE MONDE | 30.09.08

Jean-Pierre Langellier

RIO DE JANEIRO CORRESPONDANT

e gouvernement brésilien envisage de limiter les achats de terres par des étrangers ou par les compagnies nationales dont le capital est majoritairement entre des mains étrangères. Il prépare un projet de loi en ce sens qui sera soumis au Congrès fédéral.

Grand comme seize fois la France, l'immense Brésil attise, depuis quelques années, la convoitise des investisseurs étrangers en quête de fermes et de plantations. Ces derniers s'intéressent en priorité aux céréales, notamment au maïs, et aux matières premières des biocarburants, soja et canne, pour lesquels la demande est forte.

La crise alimentaire mondiale a renforcé ce phénomène et réveillé un débat ancien qui sommeillait depuis une quinzaine d'années. Selon l'Incra, l'institut en charge de l'inventaire foncier et de la réforme agraire, les étrangers possèdent au moins 5,5 millions d'hectares de terres au Brésil, notamment dans les Etats du Mato Grosso et de Sao Paulo.

Mais ce chiffre sous-évalue la réalité. Il ne prend pas en compte les terres acquises par des compagnies brésiliennes dont l'actionnariat est partiellement ou majoritairement étranger. Elles ne sont obligées, au moment de l'achat, ni de préciser la nature de leur capital, ni de faire enregistrer l'opération sur un registre à part. Le projet de loi les soumettrait à cette double déclaration. La nature de l'exploitation agricole devrait être également soumise à une autorisation ministérielle.

L'acquisition de terres par des étrangers est actuellement régie par une loi de 1971 assez contraignante mais qu'un juge avait estimée contraire à la Constitution en 1995, ouvrant la voie à des achats incontrôlés. La future loi reprendra à son compte l'essentiel des dispositions de l'ancien texte. Celui-ci interdit notamment de céder à des étrangers plus du quart du territoire rural d'une municipalité.

HAUSSE DU FONCIER
La hausse des denrées alimentaires et la profitabilité des biocarburants ont incité un nombre accru d'étrangers à acheter ou à louer des terres au Brésil. Cette demande en hausse a valorisé les prix fonciers, de + 18 % en moyenne en 2007.

La loi à l'étude ne fait pas l'unanimité. Certains la jugent un rien xénophobe, ou craignent qu'elle n'effarouche les investisseurs. D'autres soulignent que les étrangers sont souvent plus respectueux de l'environnement que nombre d'exploitants brésiliens, car surveillés par leurs clients consommateurs. Au demeurant, ajoutent-ils, le "péril" doit être relativisé. Dans l'Etat de Sao Paulo, où ils sont proportionnellement les plus présents, les étrangers ne possèdent que 2,18 % du territoire.

Mais la majorité des experts approuvent le projet. L'Etat, observent-ils, doit d'une part réaffirmer sa souveraineté foncière, de l'autre connaître avec précision qui, dans ce domaine, possède quoi. "Le Brésil ne doit pas être vendu aux enchères", proclame Heraclites Fortes, président de la commission des relations extérieures du Sénat.

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