La Banque mondiale épinglée au Honduras

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Des agents de la police hondurienne arrêtent des leaders paysans de Bajo Aguán qui manifestent dans le capital, Tegucigalpa. Photographe : AFP/Getty Images
Financial Afrik | 12 January 2014

L’édito de Jean-Michel Meyer:

La Banque mondiale épinglée au Honduras

Toute ressemblance ou similitude avec des faits réels, etc, etc… L’avertissement est connu des cinéphiles. Et la mésaventure qui vient d’arriver au Honduras à la Société financière internationale (SFI), le bras armé de la Banque mondiale pour financer le secteur privé, aurait pu servir de base à la trame d’un scénario pour un thriller financier comme Hollywood en a le secret.

A coup sûr, les producteurs auraient choisi de situer l’intrigue en Afrique plutôt qu’en Amérique centrale pour gagner en crédibilité. Le hic ? Ce n’est pas une banque africaine, mais bel et bien la SFI qui est montrée du doigt pour avoir financé au Honduras une entreprise soupçonnée de trafics de drogue et du meurtre de dizaines de paysans.

C’est l’histoire de l’arroseur arrosé. En effet, la Banque mondiale s’est bâtie un business qui consiste à imposer aux Etats les politiques publiques à suivre, quitte à modifier les règles à 180° plusieurs années après, et à donner des leçons de bonne gouvernance à la planète entière, et à l’Afrique en particulier. Là, un audit interne de la Banque met en cause la SFI pour avoir octroyé en 2009 un prêt de 30 millions de dollars à la société Dinant pour étendre son site de production d’huile de palme dans la vallée d’Aguan, au nord du Honduras.

Un prêt accordé deux mois après que la Banque mondiale a gelé au plan mondial les investissements dans l’huile de palme… De plus, Dinant a une réputation sulfureuse, dont la SFI n’a pas tenu compte. « La SFI aurait dû être davantage consciente des allégations publiques à l’encontre de son client et de son image négative », indique le rapport du Compliance Advisor ombudsman (CAO), l’un des organismes internes de contrôle de la Banque mondiale, critiquant une supervision « inadéquate. »

Dinant est accusée par plusieurs ONG (Oxfam, Global witness,…) d’avoir fait exécuter une centaine de paysans pour s’emparer de leurs terres pour exploiter des palmiers à huile. Des propriétés de la société Dinant réputées également, indique le CAO, être des points de ravitaillement pour les trafiquants de drogue. Même s’il ne s’agissait que de rumeurs, insiste le CAO, leur simple existence aurait dû alerter la SFI dans le but « de préserver la réputation de la Banque mondiale. » L’institution vient d’apprendre à ses dépens que le risque zéro n’existe pas. Espérons qu’elle s’en souviendra quand elle jugera à l’avenir les bilans des Etats.

Mais la leçon peut aussi intéresser les Africains. Petit pays, pauvre, mais très fertile, le Honduras était considéré comme l’archétype, dans tous les sens du terme, de la république bananière : un pays dirigé par quelques familles très riches, proches de multinationales, comme Chiquita, l’ex United fruit company. Les entreprises bananières ont quitté le Honduras dans les années 1930, et la banane a partagé la terre du pays avec la noix de coco, l’ananas et les pamplemousses. Mais depuis trois ans, la culture du palmier à huile connaît une progression exponentielle sans précédent, portée par des sociétés sans scrupules comme Dinant.

Bien entendu, toute ressemblance ou similitude avec des faits constatés sur un autre continent seraient forcément fortuite.

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