Déforestation illégale, accaparement des terres… Les géants de la fast fashion H&M et Zara épinglés par une ONG

L'ONG britannique Earthsight accuse dans un rapport H&M et Zara d'être « liés » à des activités de déforestation illégale à grande échelle au Brésil.
La Tribune | 11 Avr 2024

Déforestation illégale, accaparement des terres… Les géants de la fast fashion H&M et Zara épinglés par une ONG

H&M et Zara sont mis en cause par l'ONG britannique Earthsight pour être liés à des activités de déforestation illégale ou de violence dans des plantations de coton détenues par leurs sous-traitants. Des accusations qui interviennent alors que le secteur de la fast fashion est de plus en plus pointé du doigt en Europe et en France.

C'est une nouvelle accusation qui éclabousse le secteur de la fast fashion. L'ONG britannique Earthsight accuse dans un rapport H&M et Zara d'être « liés » à des activités de déforestation illégale à grande échelle au Brésil, d'accaparement de terres, de corruption et de violence dans des plantations de coton détenues par leurs sous-traitants.

Intitulé « Crimes de mode: les géants européens de la mode liés au coton sale du Brésil », le rapport compile et analyse des données publiées à partir d'images satellite, de décisions de justice, de registres d'expédition de produits et d'enquête sous couverture. L'ONG explique ainsi avoir retracé le parcours de 816.000 tonnes de coton provenant de deux des plus grandes entreprises agroindustrielles du Brésil - SLC Agrícola et le groupe Horita - dans l'ouest de l'État de Bahia.

Ces exploitations appartiennent à des familles brésiliennes, qui exercent leurs activités dans une partie de la région du Cerrado, savane réputée pour la richesse de sa faune et de sa flore. Or, elles ont « un lourd passif de procédures judiciaires, de condamnations pour corruption et de millions de dollars d'amendes pour déforestation illégale », dénonce l'ONG.

Ces tonnes de coton ont ensuite atterri dans huit usines textiles d'Asie où s'approvisionnent entre autres les deux géants de la fast fashion que sont l'espagnol Zara et le suédois H&M. Un coton certifié comme « durable » par l'organisation à but non lucratif Better Cotton (BC), selon Earthsight.

« Pour s'assurer que le coton provient d'une source éthique, les deux entreprises s'appuient sur le coton fourni par des agriculteurs certifiés par Better Cotton, le système de certification du coton durable le plus connu au monde » mais qui a « de profondes lacunes », regrette Earthsight.

Enquête indépendante

Les acteurs n'ont pas tardé à réagir après la publication du rapport. Le label Better Cotton a indiqué à Earthsight qu'il « avait confié à un auditeur indépendant le soin d'effectuer des visites de vérification renforcées » à la suite du rapport de l'ONG.

De son côté Inditex, la maison mère de Zara, a déclaré auprès de l'AFP : « Nous prenons très au sérieux les accusations contre Better Cotton, qui interdit strictement dans son cahier des charges des pratiques comme l'usurpation des terres et la déforestation ».

Inditex demande « le plus rapidement possible » les résultats de l'enquête indépendante.

Même son de cloche du côté de H&M. « Les conclusions du rapport d'Earthsight sont très préoccupantes et nous les prenons très au sérieux », a indiqué la marque. Le groupe a souligné « avoir été l'un des premiers à passer à un coton 100 % biologique, recyclé ou approvisionné de manière durable » et « suivre les conclusions de l'enquête » en dialogue « étroit » avec Better Cotton.

D'autant que récemment, les Etats membres du Conseil européen ont validé mi-mars une législation créant un « devoir de vigilance » imposant aux entreprises de l'UE des obligations pour protéger l'environnement et les droits humains dans leurs chaînes de production à l'échelle mondiale.

Quatre milliards de tonnes de CO2 par an

La fast fashion est souvent montré du doigt pour ses conséquences environnementales et sociales qu'elle induit. En effet, l'industrie textile est l'une des plus polluantes : cent milliards de vêtements sont vendus annuellement dans le monde et génèrent quatre milliards de tonnes de CO2 par an, selon l'Agence de la transition écologique (Ademe), part à laquelle contribue largement la « fast fashion ».

Consacrée dès les années 1990 en France avec l'arrivée de Zara, la « fast fashion » puis l' « ultra fast fashion » s'imposent dans les habitudes des consommateurs et déstabilisent le marché de la mode. Cette mode se définit en premier lieu par un renouvellement très fréquent de son catalogue.

Selon l'ONG Les Amis de la Terre, le géant chinois Shein propose, par exemple, « 470.000 modèles disponibles en temps réel » sur son site. Sur la même période, H&M en proposait 25.000, note l'ONG. Le nombre de modèles disponibles par jour pour Shein est même 900 fois plus élevé que celui d'une enseigne française classique.

Légiférer pour ralentir le marché

Pourtant, le marché de la fast fashion ne connaît pas la crise. Il « devrait franchir la barre des 250 milliards d'euros d'ici 2028, soit une croissance annuelle d'environ 3,8 % sur la période », note le Boston Consulting Group (BCG), s'appuyant sur l'étude The Global Fashion Market (2022-2028) et Statista.

Afin de freiner ce développement ahurissant, l'Assemblée nationale a voté mi-mars à l'unanimité différentes mesures comme une interdiction de la publicité pour la vente de vêtements à prix cassés inondant le marché. Mais la mesure principale reste le renforcement du système de « bonus-malus » dans le secteur textile, pour tenir compte des « coûts environnementaux » d'une production excessive.

La proposition de loi, adoptée en première lecture, devra désormais être examinée par le Sénat. Elle émane du groupe Horizons, l'une des trois composantes de la majorité présidentielle, dans le cadre de sa journée réservée au Palais Bourbon.

(Avec AFP)

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