L'autre guerre d'Ukraine

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Les plaines étendues de l'Ouest de l'Ukraine, autrefois le grenier à blé de l'Union soviétique, sont convoitées par des entreprises telles que Monsanto. (photo : Wikicommons)

Mediapart | 12 mai 2015

L'autre Guerre d'Ukraine

Par Vincent Doumayrou

Pour sa première parution sur Mediapart, mon blog s'internationalise... un peu. Les médias présentent le conflit en Ukraine comme un conflit entre la Russie, qui veut opprimer le pays, et les pays occidentaux, qui ne veulent que l'aider. Cet article, adapté du site belge néerlandophone d'information alternative De Wereld morgen, montre qu'une décision prise le 15 février dernier fait apparaître le conflit sous un autre jour...


Peu d'observateurs se sont attardés sur le fait qu'en marge du conflit militaire dans l'est du pays, le Fond monétaire international (FMI) a accordé un prêt de 15,3 milliards d'euros à l'Ukraine, le 15 février dernier. L'institution veut appliquer les mêmes remèdes que ceux qu'il a déjà mis en œuvre en Grèce et dans bien d'autres pays, alors que tout montre que cette approche est vouée à l'échec.

De Wereld morgen - http://www.dewereldmorgen.be

Lode Vanoost - traduit et adapté du néerlandais par Vincent Doumayrou, avec l'aimable autorisation de la rédaction de De Wereld Morgen

Paru le 17 février 2015


Il se pourrait que le conflit à l'Est de l'Ukraine ne reste pas longtemps la principale préoccupation de la population. Le FMI a en effet accordé un énorme prêt au pays, avec les conditionnalités bien connues.

Ainsi, il faut mettre fin à quasiment toute forme de subventions publiques. Ces conditions d'économies drastiques sont bien connues depuis des années. Elles se soldent, entre autres, par la suppression du double décompte des années travaillées à des tâches pénibles, mesure qui concerne notamment les ouvriers de la sidérurgie et les mineurs ; par le doublement du prix de l'essence pour les familles ; par la suppression des subventions à l'achat pour la viande de poulet et de porc, et par la privatisation de toutes les mines de charbon.

De plus, tous les terrains appartenant à l’État doivent être vendus au secteur privé, c’est-à-dire, de fait, aux entreprises étrangères et / ou aux oligarques ukrainiens.

Selon l'analyste américain Michael Hudson, économiste à l'Université du Missouri, il en ressort que ce qui attend la population ukrainienne est un avenir de mendiants des institution financières internationales. Les conditions que le FMI impose à l'Ukraine correspondent à celles qu'il a imposées par le passé à la Grèce, au Portugal et à l'Espagne.

Hudson craint une répétition de la tragédie grecque : "Il y a des dettes que vous devez rembourser. Vous n'en avez pas les moyens. Le FMI en déduit qu'il faut faire ce que d'autres pays ont fait avant vous. Vendre tout ce qui appartient à l'Etat. Ou laisser vos oligarques pour prendre le contrôle des monopoles publics, de concert avec les investisseurs occidentaux... deux ou trois ans plus tard, ils reviennent et disent : "Ouh là là, vous ne pouvez plus payer. Nous sommes désolés de voir que nos prévisions prévues se soient avérées fausses...""

La partie la plus lucrative des conditions imposées par le FMI réside dans la suppression du moratoire sur la vente des terres agricoles.

Il existe une loi, en Ukraine, qui prohibe la vente de terres agricoles à des étrangers. Elle ressemble à la législation australienne, par laquelle on veut empêcher de nuire des investisseurs américains ou chinois.

En outre, le FMI veut supprimer toute législation de protection des consommateurs ou de l'environnement.

L'Ukraine voit s'appliquer la même politique néolibérale qui, à l'avenir, rendra la vie plus dure qu'elle ne l'est aujourd'hui. Ce qui en ressort, on le voit en Grèce, au Portugal, en Espagne ou en Irlande. La même chose s'est produite dans les années 1980 dans tous les pays d'Amérique latine, où le FMI a imposé la même politique d'ajustement structurel, un euphémisme pour la mise à bas de toutes les compétences sociales de l’État.

D'après l'ONU et la Banque mondiale, l'Ukraine occupe le même rang, en matière d'inégalités, que le Nigeria. Les oligarques ukrainiens, qui ont fait main basse sur le secteur industriel du pays après la chute de l'Union soviétique, sont les mêmes que ceux qui aujourd'hui vont se tailler la part du lion pour capter les fruits des prêts du FMI. "L'ukrainien moyen ne verra pas la couleur de cet argent", dit Michael Hudson.

Lode Vanoost

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Pour me contacter : vincent-doumayrou[a]laposte.net

Voir aussi : http://d-arras-a-groningen.skynetblogs.be

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