Le pillage des forêts de Papouasie-Nouvelle-Guinée s’accélère

Medium_pomio_2-266

Le Temps | 20 décembre 2013

Le pillage des forêts de Papouasie-Nouvelle-Guinée s’accélère

Par Gilles van Kote

Cet archipel constitue un nouvel eldorado pour l’exploitation des ressources naturelles (énergie, extraction minière, agriculture, forêts, etc.). Un rapport décrit comment des entreprises – majoritairement malaisiennes et australiennes – ont déboisé de vastes surfaces, enregistrant sur la vente de ce bois un gain bien supérieur aux compensations versées aux communautés propriétaires des terres. Les biologistes s’inquiètent

La Papouasie-Nouvelle-Guinée constitue-t-elle un nouvel eldorado pour l’exploitation des ressources naturelles? Plusieurs signaux dans les domaines de l’énergie, de l’extraction minière, de l’agriculture ou de la forêt semblent l’indiquer. Le dernier en date est l’annonce par Total, le vendredi 6 décembre, d’une prise de participation majoritaire dans un projet d’exploration gazière. Le groupe français, dont les premiers investissements dans ce pays océanien datent de 2012, envisage de construire à terre, si les explorations sont concluantes, une usine de gaz naturel liquéfié (GNL).

Cette nouvelle survient quelques jours après la publication d’un rapport de l’Oakland Institute, ONG basée aux Etats-Unis, sur les acquisitions de terres et l’exploitation de la forêt papouane-néo-guinéenne par des entreprises étrangères. Ce document décrit un pillage en règle des ressources en bois du pays, avec la complicité des autorités locales.

Largement doté en ressources na­tu­relles (bois, cuivre, or, gaz, etc.), l’archipel est décrit par la Banque mondiale comme un ­«paradoxe de richesse sans déve­lop­pement». La Papouasie-Nouvelle-Guinée est devenue le deuxième exportateur mondial de bois tropicaux, derrière la Malaisie, mais en 2012 elle figurait seulement à la 156e place du classement mondial basé sur l’indice de développement humain: le pays n’est pas en mesure d’assurer des services de base à sa population, de 6,4 millions d’habitants.

«En offrant les ressources naturelles de la Papouasie-Nouvelle-Guinée à des intérêts étrangers, on a fait de ce pays l’un de ceux qui enregistrent le plus fort taux de croissance économique au monde», dit le rapport, qui cite des taux proches de 10% par an.

Selon les auteurs, alors que la Constitution du pays, indépendant depuis 1975, était l’une des plus protectrices en matière de droits fonciers coutumiers et de droits des communautés locales, la création d’un système de baux spéciaux pour l’agriculture et le développement économique a permis à des entreprises étrangères de mettre la main sur 5,5 millions d’hectares, soit 12% de la superficie de ce pays, qui abrite la troisième forêt pluviale au monde.

Le rapport décrit comment, s’abritant souvent derrière des projets de développement agricole sans avoir d’expérience réelle en la matière, ces entreprises – majoritairement malaisiennes et australiennes – ont déboisé de vastes surfaces, enregistrant sur la vente de ce bois un gain bien supérieur aux compensations versées aux communautés propriétaires des terres. Selon l’Oakland Institute, le bois est massivement exporté vers la Chine, transformé, puis expédié vers les marchés européens et nord-américains sans mention de sa véritable origine.

«Il s’agit d’une logique de développement fondée sur un capitalisme incontrôlé, l’investissement étranger et l’exploitation des ressources, opérant dans un contexte de corruption généralisée et de dysfonctionnements administratifs», estiment les auteurs. Ceux-ci citent l’exemple d’une société australo-américaine qui aurait obtenu une concession de plus de 2 millions d’hectares de forêts pour construire une route.

Cette description ne surprend pas le botaniste Olivier Pascal, qui a mené une expédition scientifique en Papouasie-Nouvelle-Guinée en 2012 et 2013, et avait notamment relevé l’accumulation de boues rouges rejetées par une usine de transformation du nickel dans les sédiments d’un lagon.

«Le moindre village est parfaitement informé de la manne financière qui se déverse actuellement sur le pays et veut sa part du gâteau, témoigne-t-il. Comme les communautés locales sont propriétaires des terres et des ressources, elles peuvent en faire ce qu’elles veulent, y compris les vendre à vil prix.»

Selon l’Oakland Institute, la commission d’enquête créée par le gouvernement en 2011 a conclu que la majorité des concessions agricoles avaient été obtenues au prix d’un recours à la menace et à la corruption, et sans un accord libre, informé et préalable des populations.

  • Sign the petition to stop Industria Chiquibul's violence against communities in Guatemala!
  • Who's involved?

    Whos Involved?


  • 13 May 2024 - Washington DC
    World Bank Land Conference 2024
  • Languages



    Special content



    Archives


    Latest posts