La grande braderie des terres africaines

Tribune de Genève | 25.11.2008

CRISE ALIMENTAIRE | La Corée du Sud vient de louer la moitié des terres cultivables de Madagascar. Sur le continent noir, ce type de transaction se multiplie.

YANNICK VAN DER SCHUEREN

Crise alimentaire mondiale oblige, le géant sud-coréen Daewoo Logistics vient de conclure un accord avec Madagascar pour louer 1,3 million d’hectares – la moitié de la surface cultivable de la Grande Ile – lui permettant de produire du maïs et de l’huile de palme pendant 99 ans. L’envolée des cours des denrées alimentaires en début d’année et la pénurie de terres agricoles dans certaines régions incitent toujours plus de pays à partir en quête hors de leurs frontières. Dans cette course aux terrains arables, l’Afrique subsaharienne serait devenue l’objet de toutes les convoitises, affirme l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).

L’accord entre Daewoo et le gouvernement malgache, conclu en juillet dernier et révélé à la mi-novembre par le Financial Times, devrait permettre aux Sud-Coréens de produire 500?000 tonnes d’huile palme et quatre millions de tonnes de maïs par an à partir de 2009. De quoi renforcer la sécurité alimentaire de leur pays, quatrième importateur mondial de maïs.

Concession gratuite

Plus surprenant, Daewoo ne versera pas un franc de location, selon le quotidien économique britannique. En contrepartie, la filiale agroalimentaire du conglomérat sud-coréen prévoit d’investir six milliards de dollars au cours des 25 prochaines années, en finançant notamment la mise en place des infrastructures nécessaires à l’exploitation des terres. Quand à la récolte, elle devrait être exclusivement destinée à la Corée du Sud. A défaut d’argent et de nourriture, Madagascar, où 70% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, devra se contenter des emplois générés par ce projet ainsi que des aménagements réalisés pour l’occasion – routes et réseaux d’irrigation.

Néocolonialisme
Mais la Corée du Sud n’est de loin pas le seul pays riche à se ruer sur l’Afrique. Selon la FAO, ils seraient de plus en plus nombreux à mettre la main sur les immenses terres du continent noir pour assurer leur approvisionnement alimentaire ou fournir le marché croissant des biocarburants. Espérant des retombées économiques, la plupart des gouvernements africains sont prêts à accorder des concessions à des investisseurs étrangers. Même si cela doit se faire au détriment de leur propre population affamée. Ainsi l’Angola est en négociation avec des investisseurs brésiliens, canadiens et américains. Le Soudan cherche preneur pour ses 900?000 hectares. L’Ethiopie courtise les Saoudiens et la Tanzanie suscite l’intérêt des Occidentaux pour la production de biocarburants. L’agence onusienne a beau tirer la sonnette d’alarme et mettre en garde contre les risques de «néocolonialisme», le phénomène ne cesse de s’étendre.

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