Le foncier, d'hier à aujourd'hui, ou Saga autour du foncier au Sénégal

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APS | 1 juillet 2016

Le foncier, d'hier à aujourd'hui, ou Saga autour du foncier au Sénégal

Par Sokhna Bator Sall

Dakar, 1-er juil(APS) - L'histoire renseigne que la propriété foncière au Sénégal est caractérisée par d'une part le droit coutumier c'est-à-dire que les terres étaient détenues après le legs de leurs ancêtres par les "lamans" (propriétaires terriens), d'autre part, par l'immatriculation des terres en vertu du décret foncier de 1932, par les autorités coloniales.

Cette dualité de régime juridique des terres a caractériséle Sénégal indépendant jusqu'en 1964 et va se poursuivreau delà par l'adoption en 1976 du code du domaine de l'Etat.

A l'indépendance, l'Etat ne disposaiten vérité que de terres immatriculées par les colons. Il se posait alors, le problème de la propriété foncière de l'Etat. Deux choix s'offraientà l'Etat: la reconnaissance du droitde propriété foncièreaux détenteurs des terres et la reconnaissance de la propriété foncière à toute la nation.

Pour ce dernier choix, il faut savoir qu'en cas de besoin, l'Etat peut en disposer par la seule déclaration d'utilité publique. Il opta pour ce dernier.

A cet effet, le code du domaine national fut adopté en 1964 et toutes les terres non immatriculées revinrentà la nation et la gestion revenait ainsi à l'Etat.

Aujourd'hui, l'Etat s'engage à améliorer la gestion foncière pour répondre aux besoins de développement et de cohésion sociale. C'est en ce sens que la Commission nationale de réforme foncière (CNRF), mise en place par les autorités étatiques, s'est fondée sur les principes de participation, de décentralisation, de respect des droits des femmes et des minorités entre autres.

Cette réforme foncière est l'ensemble des textes qui doivent être pris pour améliorer le mode de gestion du foncier au Sénégal.

"Il y a déjà la loi sur le domaine national, datant de 1964 avec laquelle, certaines parties ne seront plus adaptées au contexte actuel. Il va donc falloir les revoir et les mettre en conformité avec la volonté des populations et de l'Etat" a analysé Baba Ngom, ancien secrétaire général du conseil national de concertation et de coopération des ruraux (CNCR).

Donc, a-t-il indiqué, du temps du parti socialiste, "le cabinet sollicité pour réformer la loi sur le domaine national, constatant les difficultés du foncier, avait proposé trois solutions: laisser les choses telles qu'elles sont, procéder à une privatisation à outrance ou totale du foncier ou avoir un système mixte".

En son temps, le gouvernementqui était en place, s'était alors approché pour avis, à l'association des communautés rurales, au CNCR et au secteur privé. Selon M.Ngom,le CNCR, avait entamé un processus de réflexion sur des propositions paysannes de réforme foncière recueillies dans une cinquantaine de communautés rurales".

"Plus de 500 participants, ruraux et non ruraux, d'horizons divers réunis pendant cinq jours ont contribué à enrichir le travail et les rapports produits ont été partagés dans cinq ateliers inter régionaux", s'est rappelé Baba Ngom.

Partant de là, "des propositionspaysannes de réforme foncière au Sénégalcontenues dans un rapport final ont été soumises aux décideurs politiques".

Mais la crise financière, alimentaire, économique de 2008 qui a amené beaucoup d'Etats à avoir des visées sur le foncier africain et particulièrement a précipité la mise en place au Sénégal d'une commission nationale de droit à la terre. Laquelle avait débuté ses travaux après avoir une pause due au changement de régime en 2000.

Face à la nouvelle donne, "nous avons pensé revoir les propositions qui étaient déjà faites par notre organisation, en y intégrant les filières de l'horticulture, de la pêche, de l'élevage, mais aussi la question de l'accès des femmes à la terre", a dit Baba Ngom.

"Cela explique qu'en 2012 nous avions produit un document sur les propositions nouvelles de réforme foncière résumées en quelques points", a informé Baba Ngom, précisant que le CNCR n'était toutefois pas membre de la commission nationale de droit à la terre.

"On était oublié, mais avec de multiples contacts, une place a été réservée à la société civile", a ajouté l'ancien secrétaire général du CNCR.

Catégorique, Baba Ngom a souligné qu'"il n'existe pas de politique foncière actuellement au Sénégal où c'est le domaine national qui régit le foncier du pays. Et cette loi doit être revisée".

Cependant, il a appelé à un "moratoire et à l'arrêt de toute spéculation concernant le foncier rural d'autant plus que nous sommes dans un processus de réforme". "Il faut interdire toutes ces formes et attendre qu'il ait une nouvelle loi qui va gérer le foncier, mais aussi, une politique foncière qui va régir le foncier sénégalais", a-t-il soutenu.

Baba Ngom se réjouit du fait que "la société civile a approfondi beaucoup de choses, notamment à travers le cadre de réflexion mis en place qui n'agrée pas la démarche de l'Etat qui prône une immatriculation ou à son nom ou à celui des collectivités locales".

Pour lui, "le foncier doit être quelque chose qui appartient à tout le monde et pas seulement à l'Etat ou aux collectivités locales. Il doit rester dans sa forme de bien national. C'est pourquoi, nous recommandons que ce que le domaine national a prévu reste en vigueur".

"S'il y a des choses à améliorer, il faut le faire mais, il ne faudrait surtout pas, dire qu'on immatricule le foncier, au nom de l'Etat ou des collectivités locales", a-t-il insisté.

Sur la sortie du chef de l'Etat à l'occasion de la séance académique sur le foncer organisée par l'Académie nationale des Siences et Techniques du Sénégal (ANSTS), M. Ngom a souhaité que l'autorité suprême aille "plus en profondeur et dire que le domaine national doit rester tel qu'il est".

Le président Sall recommande la prudence sur la gestion de la réforme foncière. Il exclut toute immatriculation des terres au nom des collectivités locales, pour éviter tout bradage du patrimoine foncier.

"S'il faut l'améliorer, ou l'amender, on peut le faire, le moderniser, l'actualiser, mais il ne faudrait pas l'enlever car, au moins, le domaine national préserve le foncier pour tous", a analysé Baba Ngom.

Relevant des nuances sur les termes de domaine national, domaine
public et privé, il a indiqué que le domaine national est la gestion du foncier surtout rural qui est considéré comme un bien commun à l'ensemble de la nation et l'ensemble de la population.

"Si on dit à l'Etat ou aux collectivités locales que ce bien vous appartient, on peut se dire qu'on peut l'aliéner. C'est pour cette raison que l'on estime qu'il ne faut pas dire que telle partie de la nation est propriété du foncier", a prévenu ce producteur.

Pour lui, "le domaine national a sauvegardé en partie le foncier sénégalais et il faut maintenir ces principes pour que le foncier reste entre les mains des sénégalais, un bien commun pour tous, où, chacun peut accéder".

Il a relevé que le domaine public "revient aux infrastructures, telles que les bâtiments publics,les routes, entre autres".

"Tout cela est différent du foncier qui parfois peut revenir à des projets, des entités. Cela est toujours du domaine public de l'Etat comme les forêts classées", a dit Baba Ngom, ajoutant que "L'Etat peut l'utiliser pour les populations mais, ne peut l'aliéner".

En résumé, Baba Ngom a soutenu que "l'Etat confie la gestion du foncier rural aux collectivités locales mais elles doivent le faire au nom de l'Etat et non à leur nom propre".

Toutefois, l'ancien secrétaire général du CNCR a appelé à la mise en place "de politiques hardies de développement rural pour permettre aux acteurs de travailler la terre, de gagner suffisamment de ressources et d'avoir des revenus décents et vivre correctement".

Pour sa part, Kader Fanta Ngom, conseiller juridique, expert foncier, a fait savoir qu'au Sénégal "nous avons trois grandes masses foncières, dont chacune a une appréciation spécifique. La première qui estla plus grande est le domaine national, la deuxième est le domaine de l'Etat et la troisième est le domaine privé des particuliers".

Evoquant les caractéristiques du domaine national, M. Ngom a expliqué qu'en 1964, lorsqu'on votait la loi sur le domaine national, 95% des terres du Sénégal se trouvaient dans le domaine national. La grande masse est importante parce que, l'essentiel du domaine national se trouvait dans le monde rural et la réforme actuelle qui est en cours, touche, principalement cette première masse.

Donc, "il est très important de parler de cette première masse du domaine national, ne serait ce que sur ces deux aspects: d'abord, en termes d'occupation ensuite, la réforme en cours s'intéresse à cette masse foncière", a expliqué l'expert foncier.

Qui a ajouté que "la deuxième masse foncière est le domaine de l'Etat quia deux sous composantes que sont: le domaine public de l'Etat et le domaine privé de l'Etat. Le domaine public de l'Etat est géré par l'Etat mais, n'est pas sa propriété. En guise d'exemple, on peut citer les marchés, les routes, les aéroports,les gares, le domaine public maritime, entre autres".

"Ce sont des domaines que l'Etat gère et qui sont mis à la disposition du public et que tout le monde peut utiliser bien entendu que cela nécessite des règles pour les encadrer et organiser l'utilisation et l'accès à ces domaines", a indiqué le conseiller juridique.

En ce sens, il a préciséque "ce n'est pas une propriété de l'Etat. Il n'a pas un titre de propriété privé sur le domaine public mais, il a le pouvoir de le gérer afin que tout le monde y accède".

La deuxième sous composante du domaine public de l'Etat, est le domaine privé de l'Etat. Dans ce cas, l'Etat a un titre de propriété sur ce domine privé. "C'est comme un particulier qui a un titre foncier sur sa maison. L'Etat a aussi des titres fonciers", a-t-il expliqué.

Sur toutes les terres où, l'Etat a un titre foncier, ces terres relèvent du domaine privé de l'Etat. En résumé, a-t-il souligné, le domaine public de l'Etat et le domaine privé de l'Etat composent le domaine de l'Etat de façon globale.

La troisième grande masse foncière qui est le domaine privé des particuliers notamment les baux, les titres fonciers relève du patrimoine foncier de l'individu ou de la personne morale.

"Tout ce qui relève du patrimoine foncier d'un individu ou d'une personne morale, en dehors de l'Etat, c'est le domaine privé des particuliers", a précisé Kader Fanta Ngom.

Au Sénégal, actuellement, "nous sommes dans un processus de réforme foncière. En décembre 2012, le président Sall, a mis en place une Commission nationale de réforme foncière (CNRF), pour apporter des modifications sur le régime juridique foncier existant au Sénégal et principalement sur le domaine national", a-t-il rappelé.

"Pourquoi principalement sur le domaine national parce que, chaque masse foncière, a un régime juridique particulier. Pour les terres du domaine national, c'est la loi sur le domaine national de 1964, qui lesrégit", a analysé M. Ngom.

En outre, a-t-il fait observer, "chaque grande masse foncière a un régime juridique particulier". Pour la deuxième masse foncière sur le domaine de l'Etat, il y a le code du domaine de l'Etat de 1976 qui régit le domaine privé et celui public de l'Etat. Pour le domaine privé des particuliers, il y a une loi de 2011, qui régit tout ce qui est règles juridiques des particuliers.

De ce fait, la CNRF, mise en place par décret présidentiel est appelée à réfléchir sur la réforme du domaine national, a dit M. Ngom, rappelant que la publication en 2011 d'un décret présidentiel pour transformer les "permis d'occuper" en "titres fonciers".

Ainsi, entre autres missions, la CNRF doit proposer des mesures pratiques pour mettre en application, ce décret de 2011.

Mais le gros morceau, pour la CNRF est de voir, "comment réformer la loi sur le domaine national, dans la mesure où, l'essentiel des terres du Sénégal, se trouve en milieu rural", a soutenu Kader Fanta Ngom, retenant que "cette réforme est très sensible et complexe".

D'autre part, "il y a eu une amélioration du contexte entre 1964 et aujourd'hui, il y a eu une mutation contextuelle", a relevé M. Ngom, s'interrogeant si "la loi de 1964 qui régissait les terres est aujourd'hui pertinente ou doit-elle être modifiée?". Voilà, selon lui "toute la problématique à laquelle la CNRF doit apporter des réponses".

Donnant son appréciation sur la politique foncière au Sénégal, l'expert a indiqué que "dans le passé, il y avait moins de conflits fonciers car, l'enjeu n'était pas de taille. Aujourd'hui, on ne peut pas rester une semaine sans entendre des conflits relatifs au foncier, relayés par la presse".

Cela s'explique, selon lui, "par une forte pression sur la terre". "En 1964, lorsqu'on votait la loi sur la terre, la population du Sénégal tournait autour de 3 millions d'habitants alors qu'aujourd'hui, en 2016, la seule région de Dakar fait plus de 3 millions", a-t-il souligné, ajoutant que, "de nos jours la population accroît alors que les terres ne bougent pas".

"La deuxième difficulté est la diversité des usagers du foncier. Il y a 50 ans, dans le monde rural ce n'était que les paysans qui avaient besoin de terres pour leur petite agriculture. Ce n'est plus le cas aujourd'hui où, les communes augmentent et n'ont plus assez de terres, l'Etat en a besoin pour les infrastructures mais aussi l'industriel", a relevé M.Ngom.

D'autre part, a-t-il déploré, des communes font des extensions sur les villages environnants pour transformer en lotissement leurs terres agricoles.

Ce fait, selon lui, "constaté dans toutes les grandes communes au Sénégal vient accentuer les conflits fonciers".

Ici, "la commission nationale de réforme foncière avait dégagé deux grandes options de réformes que sont l'immatriculation de toutes les terres du domaine national au nom de l'Etat et l'immatriculation des terres au nom des collectivités locales", a dit KaderFanta Ngom.

La deuxième option étant été évacuée par le chef de l'Etat, Macky Sall, il ne reste que la première qui est d'immatriculer toutes les terres du domaine national au nom de l'Etat.

Cependant, s'est-il empressé de dire, "une immatriculation au nom de l'Etat pose des problèmes et c'est là où se trouve le différend entre la CNRF et les organisations de la société civile".

Pour la CNRF, il faut immatriculer toutes les terres du domaine national au nom de l'Etat. C'est ce que l'on appelle, une immatriculation généralisée. Ainsi, l'Etat peut donner des baux aux collectivités qui par la suite, distribuent des sous baux aux usagers.
Mais, quelle est la différence entre ce que la CNRF propose et ce que existe actuellement, s'interroge-t-on?.

Kader Fanta Ngom a fait savoir que "dans le cadre de la loi sur le domaine national, il n'y a pas d'immatriculation et cela veut dire que les terres sont inappropriées, qu'elles n'appartiennent à personne même pas à l'Etat, qui ne dispose pas de titre de propriété sur le domaine national".

Les terres du domaine national sont mises à la disposition de collectivités locales qui doivent les distribuer en fonction des demandes émanant des populations. "Cela fait que quand on donne une terre à un usager, il a l'obligation de la mettre en valeur, sinon, la collectivité a le devoir de la retirer pour l'attribuer à quelqu'un d'autre", a-t-il expliqué.

"A cet égard, dés l'instant que l'on parle d'immatriculation, on parle alors, d'appropriation est cela est une réforme radicale par rapport à la loi sur le domaine national", a-t-il relevé.

"A partir de ce moment, au Sénégal, on ne doit plus parler de loi sur le domaine national", a souligné M.Ngom, estimant que "la loi sur le domaine national fait partie des meilleures constructions juridiques du Sénégal".

Toutefois, le conseiller juridique a reconnu que "face au contexte actuel, il faut reprendre cette loi, la contextualiser et non l'enlever complètement pour amener un nouveau système d'immatriculation".

"Je suis tout à fait contre ce système d'immatriculation généralisée des terres au Sénégal", a-t-il fait savoir, analysant que "cela conduit à une marchandisation des terres alors que les terres du domaine national ne peuvent pas faire l'objet de vente".

"Cela est un atout que le Sénégal a, par rapport à certains pays de la sous région. Un pays comme le Libéria, près de 50% des terres sont détenues par des investisseurs étrangers parce que la terre est sur le marché foncier. On peut vendre, acheter et faire toutes les transactions nécessaires", a souligné l'expert foncier.

Par contre, "au Sénégal toutes les transactions foncières, sont interdites sur les terres du domaine national", a-t-il dit, ajoutant que "c'est pourquoi nous arrivons à préserver notre patrimoine foncier".

Au bout du compte, "s'il y a immatriculation, cela veut dire que toutes les transactions sont permises. On peut vendre, mettre en gage, louer, tout faire sur les terres. Au finish, les terres, seront entre les mains de ceux qui détiennent les capitaux pour acheter", a relevé le conseiller juridique.

"Pour la société civile, il est primordial de prendre l'avis préalable de la population à la base sur tout ce que doit être fait sur la terre car, la sécurisation foncière n'est pas de disposer d'un titre juridique d'occupation mais, le premier élément qui permet à l'investisseur de travailler en toute quiétude, est l'accord local".

"Si les populations locales s'engagent à accompagner le projet de l'investisseur, il va réussir. Au cas contraire, s'il dispose de tous les documents légaux et que les populations n'adhèrent pas à ce projet, il n'arriverait jamais à ce que l'on appelle un retour sur investissement", a estimé Kader Fanta Ngom.

La nouvelle loi foncière doit s'adosser aux expériences déjà existantes dans le cadre de la loi sur le domaine national qui est une "très bonne" loi avec certes des manquements, des insuffisances du point de vue des mutations observées depuis 1964 qu'il faudrait contextualiser pour mieux l'adapter, a souligné M. Ngom.

Selon lui, "Le Sénégal gagnerait à faire une revue systématique de cette loi de 1964, pour voir ce qui a marché et ce qui ne l'est pas, pour apporter des retouches nécessaires".

"L'immatriculation ou l'appropriation n'est pas une pratique de chez nous. La terre est un bien commun", a fait savoir Kader Fanta Ngom, tout en fustigeant "l'individualisme qui prévaut dans le système d'appropriation foncière".

"Il faut mettre en exergue nos valeurs, nos bonnes pratiques foncières locales, nos croyances. Quand je vois cela, je suis plus proche que l'on maintienne la loi sur le domaine national, avec des retouches, que de passer à une immatriculation généralisée des terres du domaine national", a-t-il déclaré.

Poursuivant sa réflexion, il a affirmé qu'il ne n'est même pas sûr que "le président de la République adopte une telle réforme au Sénégal, même si, l'enjeu principal est comment faciliter l'accès au foncier aux investisseurs".

D'après l'expert foncier, "la stratégie foncière de l'investisseur doit être de partir de la base pour remonter et formaliser, chercher les documents juridiques pour en suite, pouvoir occuper de manière paisiblela terre".

"Il faut retoucher la loi existante, corriger certains manquements, ainsi l'adapter par rapport au nouveau contexte. Elle doit être une loi cadre. Cela signifie que la loi qui est déjà votée à l'Assemblée nationale, doit dégager les plus grands axes", a-t-il répété.

"Après, on laisse aux collectivités de base, la latitude de mettre en place des règles locales de gestion foncièrequi seront conformes à la loi cadreau niveau national où tout le monde s'y retrouvera", a plaidé le juriste.

"Ainsi, les représentants de l'Etat doivent veiller, dans leur mission d'approbation des délibérations foncières, à ce que la loi cadre soit respectée", a estimé le conseiller juridique, relevant que "les responsabilités sont partagées dans cette modernisation foncière".

Les élus locaux, les propriétaires coutumiers et le commandement territorial doivent au préalable disposer des textes d'application des lois qui aideront à surmonter les impairs dans la gestion foncière.

"C'est le moment de s'asseoir, de voir quels sont les points forts, de cette loi sur le domaine national à renforcer, mais aussi, les points à corriger, au regard du nouveau contexte et de cette mutation contextuelle avec l'arrivée massive des investisseurs, les retouches à apportersur cette loi sur le domaine national, afin que tout le monde s'y retrouve", a recommandé Kader Fanta Ngom.

"La loi sur le domaine national est un outil de verrouillage qui contribue à sécuriser le patrimoine foncier au Sénégal", a dit l'expert foncier, saluant le fait que "contrairement à ce qui se passe ailleurs en Afrique, au Sénégal, il n'y a pas d'accaparement des terres du fait de cette loi sur le domaine national qui permet de sécuriser nos terres".

"Mais si jamais cette loi saute et que l'on mette cette immatriculation généralisée, c'est la porte ouverte à la marchandisation foncière et cela sera regrettable pour les populations locales", a souligné Kader Fanta Ngom.

"Cela fera l'affaire principalement des détenteurs de capitaux alors que nous sommes dans un pays pauvre et seule une minorité aura accès au foncier", a estimé l'expert foncier Kader Fanta Ngom.

Par ailleurs, la société civile s'est retrouvée dans un cadre de concertation intitulé le CRAFS (cadre de réflexion et d'action sur la foncier), qui regroupent plusieurs organisations de la société civile, sous l'égide du Conseil national de concertation et de coopération des ruraux (CNCR).

"C'était pour accompagner les communautés paysannes dans le plaidoyer contre l'accaparement des terres, les appuyer aussi à se positionner en tant qu'acteur de veille au niveau de leur communauté", a, quant à elle, soutenu Marième Sow, présidente du Conseil d'administration du réseau international Enda tiers monde, coordonatrice d'Enda Pronat,

"Nous avons pensé qu'il faut travailler sur des propositions alternatives. Nous avons aussi participé aux réflexions au niveau de la commission de réforme foncière. A chaque activité, au niveau des plénières, si nous avons des remarques, nous avons eu à formuler des propositions", a indiqué la coordonnatrice d'Enda Pronat.

De même, des animateurs des organisations membres du CRAFS ont participé aux ateliers départementaux et régionaux, a rappelé Mme Sow, relevant que "nous avons eu à travailler sur le terrain, avec des communautés sous l'éclairage de juristes et de sociologues pour harmoniser les propositions paysannes", a expliqué Marième Sow.

A cet égard, a-t-elle fait savoir, "nous avons sorti des propositions que nous avons donné au président de la commission de la réforme foncière. Les points les plus forts dans ces principes sont l'immatriculation généralisée des terres, que ce soit au nom de l'Etat ou des collectivités locales, que nous avons rejetée".

De plus, a-t-elle dit, "nous avons estimé qu'il existe des outils de gouvernance foncière qui sont élaborés par les communautés et qui ont leur importance. Ce sont les plans d'occupation des sols (POF) ou les conventions locales".

Il s'agit de voir comment doter chaque commune d'un POF, une valeur juridique devant aider à ne pas bafouer les ressources naturelles, a dit Mme Sow, estimant que "la réforme foncière doit aller avec une vision de politique foncière qui doit tenir compte d'une vision agricole".

Cela se fait avec une approche de gestion des terroirs avec les populations, soustendue par un renfoncement des capacités des populations.

L'autre facteur déterminant, a relevé Marième Sow, est le renforcement des populations qui "augmentent alors que les terres restent à la même place" et la biodiversité.

SBS/PON
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  • 01 July 2016

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