L'offensive chinoise sur la terre berrichonne

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Où s'arrêtera l'appétit agricole des Chinois dans l'Indre ?
La Nouvelle République | 04/02/2016

L'offensive chinoise sur la terre berrichonne

On les attendait dans le secteur économique. Ils se lancent dans l’agriculture. Depuis plusieurs mois, des Chinois achètent des exploitations indriennes.

Pourquoi les Chinois achètent-ils nos terres ? L'interrogation s'étalait à la une de l'édition numérique du Journal de Montréal, le 27 janvier dernier. Le même titre pourrait être utilisé dans l'Indre. Alors qu'ils sont plutôt annoncés du côté de la zone économique d'Ozans, des Chinois se lancent en effet dans l'achat de terres agricoles en Sud-Berry.

L'offensive est visiblement importante puisque 1.500 hectares auraient déjà été acquis, à Clion, Châtillon et Vendœuvres, notamment. Ils arrivent. Et lorgneraient dorénavant avec insistance vers la Champagne berrichonne. Le mouvement a été lancé voilà un an. Propriétaire d'une exploitation installée au « Grand Mée », sur le territoire de la commune de Clion, Ronald Ammerlaan a été approché par un agent immobilier. Ce ressortissant néerlandais désormais installé dans la Sarthe, avait eu plusieurs autres acheteurs potentiels. A chaque fois, la transaction s'était opposée au veto des banques. Moins de problème avec la société Hongyang de Hongkong : ses émissaires sont arrivés avec la puissance d'un groupe qui pèserait des milliers d'emplois dans l'empire du Milieu. « Ils n'étaient intéressés que par les terres. La discussion a été serrée. » La transaction était finalement signée, fin septembre.

Le cap des 5.000 hectares ?

Plus d'une centaine d'hectares à Clion. Autant à Châtillon. Un millier à Vendœuvres. Une quatrième exploitation serait tombée dans l'escarcelle. Le cap des 5.000 hectares est envisagé. Les Chinois proposeraient 10.000 à 12.000 € l'hectare, soit nettement plus que les tarifs pratiqués dans l'Indre. Ronald Ammerlaan tempère : « Je n'ai pas touché ça. » N'empêche, de telles acquisitions inquiètent le monde agricole indrien qui n'a visiblement rien vu venir.

Interrogés, les responsables départementaux de la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer), acteur normalement incontournable en matière de foncier agricole, ne cachent pas leur ignorance. Ils évoquent une raison réglementaire : « Jusqu'au 31 décembre dernier, les cessions sous forme de part de sociétés échappaient à notre contrôle. Ce ne sera plus possible puisque les textes législatifs viennent de changer. » En attendant, ce qui est acheté est acheté. Et la question mérite aujourd'hui d'être posée : où s'arrêtera l'appétit agricole des Chinois ?

" Comment en vouloir aux agriculteurs ? "

Pourquoi viennent-ils investir ici ? Quel est leur pouvoir et leur savoir-faire ? S'ils ont acquis des terres, auront-ils l'autorisation d'exploiter, normalement délivrée par la préfecture ? Les questions sont nombreuses. Robert Chaze, président de la chambre d'agriculture, avoue ne pas disposer de toutes les réponses. « Vos informations posent évidemment problème. Face à ces surenchères économiques, nos jeunes agriculteurs sont à des kilomètres d'investir et de s'agrandir. C'est extrêmement dommageable. »

La commission d'orientation agricole, notamment chargée d'épauler le préfet pour accorder les autorisations d'exploitation ? « Du bidon, fulmine Hervé Coupeau, président de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles (FDSEA). La réglementation actuelle ne permet pas d'endiguer ce genre de pratiques. Comment en vouloir aux agriculteurs ? Quand vous cherchez à vendre, que vous êtes au bord de la retraite et que vous ne trouvez pas preneurs, est-il possible de refuser des offres à 12.000 ou 13.000 € l'hectare ? »

De manière plus générale, Hervé Coupeau estime que les agriculteurs ont été lâchés par le gouvernement. Il invite ses adhérents à participer à la grande manifestation annoncée mardi 9 février, à Châteauroux.

Terres du milieu

Mille cinq cents hectares de terres agricoles ont été acquis, ces derniers mois, par une société de Hong Kong dans les secteurs de Clion, Châtillon et Vendœuvres. La surprise est de taille car les investisseurs de l'empire du Milieu sont, depuis plusieurs années, attendus du côté d'Ozans.

Que souhaitent faire les Chinois des terres agricoles qu'ils ont achetées ? C'est la question que se poseront désormais les premiers concernés : les habitants de l'Indre. Espérons que la société Hongyang lèvera bien vite un coin du voile. Car si, en matière d'investissement, la prudence est mère de sûreté, la transparence est aussi un gage de confiance.

Bruno Mascle
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